Page:Huysmans - En rade.djvu/14

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— Norine, t’as mis le boire au frais ? dit le père Antoine.

— Oui-da, et de peur que vous ne tardiez, je vas toujours aller couper la soupe.

— Alors c’est prêt là-haut ? reprit le vieux, s’adressant à Louise.

— Oui, mon oncle, mais il n’y a pas d’eau !

— De l’eau ! il en manque ben ! je vas vous en tirer un seau.

La tante Norine disparut à grandes enjambées, dans la nuit le père Antoine s’enfonça parmi des arbres dans un autre sens ; Jacques et sa femme demeurèrent seuls.

— Oui, je vais mieux, dit-elle en l’embrassant ; ce mouvement que je me suis donné m’a remise, mais montons ; j’ai fini par découvrir dans tout le château une pièce presque logeable.

Ils pénétrèrent dans un couloir de prison. Aux lueurs d’une allumette qu’il fit craquer, Jacques aperçut d’énormes murailles en pierre de taille, fuligineuses, trouées de portes de cachots, surplombées d’une voûte en ogive, abrupte, comme taillée dans le roc. Une odeur de citerne emplissait ce couloir dont les carreaux de pavage oscillaient à tous les pas.

Le corridor fit coude et il se trouva dans un gigantesque vestibule dont les panneaux peints