Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/266

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le buste droit, d’autres, les prunelles en extase, repliés en arrière et assis sur leurs talons, d’autres encore faisaient le chemin de croix et souvent ils étaient posés, les uns devant les autres, face à face et ils se regardaient sans se voir, avec des yeux d’aveugles.

Et parmi ces convers, quelques pères, ensevelis dans leurs grandes coules blanches, gisaient, prosternés, baisaient la terre.

Oh ! prier, prier comme ces moines ! s’écria Durtal.

Il sentait son malheureux être se détendre ; dans cette atmosphère de sainteté, il se dénoua et il s’affaissa sur les dalles, demandant humblement pardon au Christ de souiller par sa présence la pureté de ce lieu.

Et il pria longtemps, se descellant pour la première fois, se reconnaissant si indigne, si vil, qu’il ne pouvait comprendre comment, malgré sa miséricorde, le Seigneur le tolérait dans le petit cercle de ses élus ; il s’examina, vit clair, s’avoua qu’il était inférieur au dernier de ces convers qui ne savait peut-être même pas épeler un livre, comprit que la culture de l’esprit n’était rien et que la culture de l’âme était tout, et peu à peu, sans s’en apercevoir, ne pensant plus qu’à balbutier des actes de gratitude, il disparut de la chapelle, l’âme emmenée par celles des autres, hors du monde, loin de son charnier, loin de son corps.

Dans cette chapelle, l’élan était enfin consenti, la projection jusqu’alors refusée était enfin permise ; il ne se débattait plus de même qu’au temps où il parvenait si difficilement à s’évader de sa geôle, à Notre-Dame-des-Victoires et à Saint-Séverin.

Puis il réintégra cette chapelle où son animalité était