Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/329

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peu d’air hors les murs vous ferait du bien et j’ai proposé au R. P. abbé de vous libérer aujourd’hui de la règle, au cas où cette offre ne vous déplairait pas.

— J’accepte volontiers et je vous remercie, et vraiment, de votre charitable attention, s’écria Durtal.

Ils dînèrent d’un potage à l’huile dans lequel nageaient une côte de choux et des pois ; ce n’était pas mauvais, mais le pain fabriqué à la Trappe rappelait, lorsqu’il était rassis, le pain du siège de Paris et faisait tourner les soupes.

Puis ils goûtèrent d’un œuf à l’oseille et d’un riz salé au lait.

Nous rendrons d’abord, si vous le voulez bien, dit l’oblat, une visite à Dom Anselme qui m’a exprimé le désir de vous connaître.

Et à travers un dédale de couloirs et d’escaliers, M. Bruno conduisit Durtal dans une petite cellule où se tenait l’abbé. Il était vêtu de même que tous les pères de la robe blanche et du scapulaire noir ; seulement, il portait, pendue au bout d’un cordon violet, sur la poitrine, une croix abbatiale d’ivoire, au centre de laquelle des reliques étaient insérées, sous un rond de verre.

Il tendit la main à Durtal et le pria de s’asseoir.

Puis, il lui demanda si la nourriture lui paraissait suffisante. Et, sur la réponse affirmative de Durtal, il s’enquit de savoir si le silence prolongé ne lui pesait pas trop.

— Mais du tout, cette solitude me convient parfaitement.

— Eh bien, fit l’abbé, en riant, vous êtes un des seuls