Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/361

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Mais, il n’en fut rien ; après une courte trêve, l’assaut recommença sur un autre point.

— Es-tu bien sûr de ne t’être pas suggestionné, de ne t’être pas monté le coup à toi-même ? A force d’avoir voulu croire, tu as fini par enfanter et par t’implanter, en la déguisant sous le nom de grâce, une idée fixe autour de laquelle maintenant tout festonne. Tu te plains de n’avoir pas éprouvé des joies sensibles après ta communion, cela démontre simplement que tu ne t’étais pas assez tendu, ou que, lassée de ses excès de la veille, ton imagination s’est révélée inapte à te jouer l’affolante féerie que tu te réclamais, après la messe.

Au reste, tu devrais le savoir, tout dépend, dans ces questions-là, de l’activité plus ou moins fébrile de la cervelle et des sens ; vois ce qui a lieu pour les femmes ; elles se leurrent plus facilement que l’homme ; car là encore se décèle la différence des conformations, la variété des sexes ; le Christ se donne charnellement sous les apparences d’un pain ; c’est le mariage mystique, l’union divine consommée par la voie des lèvres ; il est bien l’époux des femmes, tandis que, nous autres, sans le vouloir, par l’aimant même de notre nature, nous sommes plus attirés par la Vierge. Mais elle ne se livre pas, ainsi que son fils, à nous ; elle ne réside pas dans le Sacrement ; la possession est avec elle impossible ; elle est notre mère mais elle n’est pas notre Epouse, comme lui est l’Epoux des Vierges.

On conçoit dès lors que les femmes s’emballent plus violemment et qu’elles adorent mieux et qu’elles se figurent plus aisément qu’elles sont choyées. D’ailleurs,