Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/47

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il y songeait, ce qui le faisait surtout frémir, c’était le souvenir de la Vierge arrivant le jeudi, dès que la nuit tombait.

L’Eglise jusqu’alors absorbée dans son chagrin et couchée devant la croix se relevait et se mettait à sangloter, en voyant la Mère.

Par toutes les voix de sa maîtrise, elle s’empressait autour de Marie, s’efforçait de la consoler, en mêlant les larmes du « Stabat » aux siennes, en gémissant cette musique de plaintes endolories, en pressant sur la blessure de cette prose qui rendait de l’eau et du sang comme la plaie du Christ.

Durtal sortait, accablé, de ces longues séances, mais ses tentations contre la foi se dissipaient ; il ne doutait plus ; il lui semblait qu’à Saint-Sulpice, la grâce se mêlait aux éloquentes splendeurs des liturgies et que des appels passaient pour lui dans l’obscure affliction des voix ; aussi éprouvait-il une reconnaissance toute filiale pour cette église où il avait vécu de si douces et de si dolentes heures !

Et cependant, dans les semaines ordinaires, il ne la fréquentait point ; elle lui paraissait trop grande et trop froide et elle était si laide ! Il lui préférait des sanctuaires plus tièdes et plus petits, des sanctuaires où subsistaient encore des traces du Moyen Age.

Alors, il se réfugiait, les jours de flâne, en sortant du Louvre où il s’était longuement évagué devant les toiles des primitifs, dans la vieille église de Saint-Séverin, enfouie en un coin du Paris pauvre.

Il y apportait les visions des toiles qu’il avait admirées au Louvre et il les contemplait à nouveau,