Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/124

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sans doute le plus gros des dispersions  ; ils vivent aux écoutes de l’arrivée de Dieu  ; ils ne sont pas loin d’être des saints… mais il y a une pelure, un zeste sur lequel ils glissent et qui les fait choir et les rejette dans la foule des saintes gens et les saintes gens ne sont pas des saints, car ce sont ceux qui s’arrêtent en haut de la côte et n’en pouvant plus, se reposent et bien souvent redescendent.

Or, la pierre de touche de la sainteté, elle n’est pas dans les mortifications corporelles et les souffrances — qui ne sont que des véhicules et des moyens — elle n’est pas, non plus, dans l’extinction des forts et des moyens péchés  ; avec l’aide du ciel, tout homme vraiment pieux et de bonne volonté peut y prétendre ; — elle est surtout dans la réalité de cette assertion du pater que nous répétons si audacieusement que nous en devrions trembler, « comme nous les pardonnons à ceux qui nous ont offensés ». Supporter, en effet, les fourberies et les injures, ne conserver aucune rancune des injustices, alors même qu’elles se prolongent et que la haine qui les attise finit par rendre l’existence intolérable ; les désirer presque, par besoin d’humiliations et par convoitise d’amour divin  ; ne souhaiter non seulement aucun mal à son bourreau, mais l’aimer davantage et demander, sans arrière-pensée, sincèrement, du fond du cœur, qu’il soit heureux et, cela, naturellement, en excusant sa façon d’agir, en s’attribuant tous les torts, eh bien, cela, à moins d’une action très particulière de la grâce, c’est au-dessus des forces humaines !

Et, en effet, la somme d’humilité et de charité qu’un tel abandon de soi-même comporte, déconcerte.

Des gens qui possèdent des vertus à un degré héroï-