Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/168

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figurent dans la lignée même de saint Benoît ; les moines noirs n’ont donc pas à faire double emploi avec eux. Dom Guéranger a limité leur mission et précisé leur but ; il les a marqués d’une empreinte originale, en les différenciant justement d’avec les autres instituts.

Sa conception de l’« Opus Dei », des messes, des heures canoniales exécutées avec art, célébrées en grande pompe, cette idée du luxe pour Dieu est, selon moi, très belle ; il siérait que les moines, chargés de la réaliser, fussent en même temps des artistes, des savants et des saints ; c’est beaucoup demander, je le sais ; mais enfin, en tenant même compte du déchet, l’œuvre n’en est pas moins magnifique !

— Voilà donc, s’écria Mlle de Garambois, quelqu’un qui rend justice à Dom Guéranger !

— On juge l’arbre par ses produits, répliqua M. Lampre. Qu’est-ce que la congrégation de France a donné ?

— Comment, ce qu’elle a donné ? Mais vous ne l’ignorez pas plus que moi ! Faut-il donc répéter que Dom Guéranger a restauré les études liturgiques, Dom Pothier le plain-chant, et Dom Pitra la symbolique, en réunissant son spicilège qui forme des volumes précieux pour quiconque veut comprendre l’âme et l’art du moyen-âge ; enfin il existe du père Le Bannier une traduction en un vieux français vraiment exquis des méditations de saint Bonaventure : c’est aussi fort, dans son genre, que les contes drolatiques de Balzac.

— Et maintenant ?

— Maintenant ! dame, je ne suppose pas pourtant que l’ordre soit à bout de sang. En tout cas, il peut revendiquer un maître livre, « le Traité de l’oraison » de