Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/194

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pour ceux qui ne l’implorent point et cela suffit ; elles saturent de ces pensées ces mots dont elles ne saisissent pas d’une façon précise le sens et qui rendent leurs désirs d’une manière absolue pourtant ; elles rappellent à Jésus ses propres assurances et ses propres plaintes. Leurs prières Lui présentent — si j’ose dire — une traite qu’il signa de son sang et qu’il ne peut laisser protester ; ne sommes-nous pas, en effet, les créanciers de certaines promesses de ses Évangiles ?

Seulement… seulement… continua le moine, après un silence, comme se parlant à lui-même, ces promesses dues à l’immensité de son amour veulent, pour qu’elles se réalisent, que nous usions envers Lui d’un juste retour — mesuré à notre aune, cependant — car, quelle misérable répercussion de l’infini, nous portons en nous ! Ce pauvre amour, il ne s’obtient que par la souffrance. Il faut souffrir pour aimer et souffrir encore lorsque l’on aime !

Mais oublions tout cela ; n’assombrissons pas la joie de ces quelques heures ; nous reviendrons à nous, après ; songeons d’abord à cette incomparable veille, à ce noël, qui a fait pleurer d’attendrissement tous les âges. Les évangiles sont brefs ; ils nous relatent les événements sans réflexions et sans détails ; il n’y avait pas de place à l’hôtellerie et c’est tout ; mais quelle merveilleuse chair liturgique s’est enroulée autour de ce noyau qui paraissait si sec ! L’Ancien Testament est venu compléter le nouveau ; et, ici, c’est l’inverse de ce qui s’opère d’habitude ; ce sont, contrairement à tous les précédents, les textes antérieurs qui parachèvent ceux qui les suivent ; le bœuf, l’âne, ce n’est pas à saint Luc mais à Isaïe que