Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/285

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Sa pharmacie qu’il l’avait tant intéressé lorsqu’il n’était pas dément, il ne la reconnaissait plus ; on l’y amena, un jour, pensant lui être agréable ; il la regarda, hébété, ne paraissant pas se rappeler qu’il avait, en cette cellule, encombrée de fioles, passé toute sa vie. La mémoire était morte ; dans les décombres de cette âme Dieu seul restait ; et de temps à autre, lorsqu’il était assis près des novices, il balbutiait quelques paroles que l’on ne comprenait pas. Croyant qu’il désirait quelque chose, on lui faisait patiemment répéter les mots, et l’on finissait par saisir qu’il parlait de Notre-seigneur et de la Sainte Vierge.

— Asseyez-vous, père, dit le frère Blanche qui l’installa sur un banc ; mettez-vous là, près de notre frère Durtal. Et, tout à coup, réveillé, le vieillard le scrutait d’un œil qui s’éclaircissait — et il secouait douloureusement la tête, le considérant avec une indicible pitié-puis il le fixait gaiement, avec un doux sourire.

Et comme tous, interdits, Durtal le premier, de ces jeux de physionomie lui demandaient : qu’y a-t-il, père ? Il retombait dans le mutisme de ses traits, incapable de s’exprimer plus.