Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/313

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l’heure imperturbable du repas, arrivez dès maintenant ; nous feuilletterons, en guise d’apéritif, mes enluminures.

— Ah ça, je veux bien, dit Durtal.

L’habitation de M. Lampre, située à deux pas de l’église et du couvent, était une de ces grandes bâtisses indifférentes, telles qu’il en prospère dans tous les bourgs. Elle sentait la province, l’odeur mélangée de la colle à poisson et de la pomme, mais elle était, à l’intérieur, assez bien distribuée et munie de vieux meubles confortables. M. Lampre la tenait de famille, ainsi que ces ruines du cloître qu’il avait données avec de vastes arpents de terre aux moines.

Il s’était simplement réservé un spacieux jardin qu’il avait séparé par un mur de celui de l’abbaye, pour que chacun fût chez soi ; et ce jardin, planté d’arbres séculaires, était traversé par des allées bordées de fleurs ; l’une arborait des massifs de roses de toutes formes, de toutes teintes, parmi lesquelles figurait la variété, assez laide du reste, de la rose verte. Sa collection de roses, entretenue à grands frais, était, en Bourgogne, cotée.

Pourtant, disait-il, un jour, à Durtal, je n’ai nullement la marotte de l’horticulture ; je me force par devoir à m’en enticher et ne dépense de l’argent que pour m’y intéresser.

Et comme Durtal qui admirait le feu d’artifice de certaines touffes jaillies du sol, le regardait sans comprendre.

— C’est bien simple, reprenait-il, je suis si paresseux, si peu marcheur, que je ne bougerais pas de chez moi, que je ne descendrais pas me promener dans le jardin, si je n’étais mu par le sentiment, très médiocre d’ailleurs,