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LES FOULES DE LOURDES

sortant du Gave, des hurlements sauvages et des cris furieux lui ordonnant de se sauver ; enfin, il tenta d’amoindrir les révélations de l’enfant en suscitant des visions plus ou moins bizarres à un groupe de possédées dont les divagations essayèrent de troubler la confiance des habitants.

Mais bientôt le bon sens revint et Bernadette fut écoutée ; alors il changea de tactique et il attisa la passion du gain chez ces carriers qui se transformèrent en hôteliers, en marchands de chapelets et de cierges et dévalisèrent, à qui mieux mieux, les pèlerins.

Et, après l’argent, ce fut la chair. Bientôt les mœurs de ces montagnards qui étaient honnêtes, lorsqu’ils étaient pauvres, se dévergondèrent ; puis ce fut l’indécent appoint des étrangers ; des liaisons impossibles dans des petites villes où chacun s’observe purent s’épanouir dans la promiscuité de ces immenses foules où l’on passe inaperçu ; ce fut, dans le hourvari des grands pèlerinages, la facilité des rencontres, l’impunité absolue des rendez-vous…

Satan put se réjouir — mais il n’obtenait, en somme, que des péchés communs, que des fautes inhérentes à la misère humaine ; il ne produisait que des oublis momentanés, que des offenses passagères que la pénitence efface.

Il voulut davantage, rêva de forfaits plus pro-