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LES FOULES DE LOURDES

que l’on eut toutes les peines du monde à l’empêcher d’en allumer un.

Il n’en est pas moins vrai que, même sans fusées et sans bombes, les fêtes liturgiques de Lourdes ressemblent aux fêtes civiques du 14 juillet ; n’y ai-je pas entendu des fanfares de cuivre et des Ave Maria soufflés dans des pistons et des trombones ? Je crois avoir, ce soir-là, souffert.

Ce pays où triomphe l’odieux spectacle de cette bravade de la beauté divine est, d’ailleurs devenu, depuis que la Vierge s’y fixa, une sorte de camp, sillonné par les grands gardes du démon.

À vrai dire, cette grotte de Massabieille lui appartenait, car c’était un lieu désert et mal famé où personne ne s’aventurait. Ses seuls hôtes étaient deux espèces d’animaux qui faisaient, l’un et l’autre, partie du bestiaire infernal au Moyen Âge : les serpents qui gîtaient dans ses crevasses et les pourceaux qui s’y abritaient, alors que Paul Leyrisse, le porcher du village, les menait paître sur les rives du Gave.

Marie balaya cette fange vivante en se montrant ; mais pour salir à nouveau cette grotte, Satan la fit, pendant la période même des apparitions, souiller la nuit par des ébats de couples ; « on a fait des sottises à la grotte », disaient les paysans qui n’ignoraient pas ces scandales ; puis il s’attaqua à Bernadette même, en extase, qui entendit derrière elle,