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LES FOULES DE LOURDES

sent, avec, devant eux, sur le bord des marches, la troupe des enfants de chœur, revêtus de la livrée bleue de la Vierge et les suisses, aux uniformes d’azur et d’argent, de vermillon et d’or.

Et, dans le fond de ce tableau resté, pendant quelques minutes, immobile, j’aperçois des mouvements qui s’opèrent ; d’abord c’est le coup brun, le ton de motte à brûler de robes de capucins que l’on pousse en avant, et c’est ensuite la soudaine explosion des tuniques violettes et pourprées des chanoines, sortis du remous blanc et noir des prêtres et placés au premier rang.

L’évêque d’Avignon tient l’ostensoir, sous une ombrelle, entouré de sacerdotes en chasubles et de céroféraires qui portent des lanternes, aux vitres cramoisies, allumées.

Nous commençons à longer après lui, lentement, la haie des malades, et déjà le cœur s’étreint. Ah ! les visages qui divaguent de détresse et d’espoir, les visages désordonnés de ce moment-là ! il y en a qui pleurent, sans bruit, la tête basse, d’autres, au contraire, qui lèvent des yeux inondés de larmes ; et des voix suffoquent, des voix à bout de souffle, des voix déjà mortes essaient de répéter le cri vivant des invocations que lance, de toute la force de ses poumons, un prêtre qui stationne, seul, sur l’esplanade ;