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LES FOULES DE LOURDES

fond de la cavité, d’une forme humaine évoluant, tout en or, sur un fond de feu.

La messe est commencée. Je m’installe, sous les arbres, sur un coin de banc ; devant moi, sont toutes les voiturettes des malades. Les nuits sont interminables pour ceux qui souffrent et les ténèbres accélèrent l’acuité des maux. Avec quelle impatience, ils ont dû attendre dans le dortoir traversé par les pas des infirmières et assourdi par les gémissements, le lever de l’aube ! est-ce aujourd’hui qu’ils guériront ? ils comptent les jours qui s’épuisent de leur passage à Lourdes. Encore deux, encore trois et il faudra, si l’on n’est pas guéri, monter l’autre pente du Calvaire, supporter, de nouveau, le mouvement de trémie si douloureux des trains. L’angoisse s’accroît à mesure que les journées s’écoulent ; tous ces pauvres gens sont là, égrenant, absorbés, leur rosaire, dardant tout à coup les regards implorants d’une bête qui se sent mourir, vers la Vierge, impassible, debout, dans l’ogive du roc.

Tous ces lamentables infirmes, qui ne peuvent remuer dans leurs voitures, ferment les yeux par respect, quand sonne l’élévation, et ceux qui peuvent bouger leurs mains, les joignent.

Et c’est une déchirante expression de souffrance et de ferveur alors que le moment de la communion est proche. Ah ! l’éloquence effrénée de ces traits