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HISTOIRE DES BERBÈRES.

dit, en parlant des Arabes dont ce prince avait châtié les brigandages :

Nourris dans le Désert, ils effrayaient les princes qui, semblables aux herbes aquatiques, ne savaient vivre sans eau.

Ils osèrent vous provoquer, vous qui, dans le Désert, dirigez votre course mieux que le Cata[1] ne dirige la sienne ! vous qui établissez vos tentes dans les solitudes éloignées où les autruches mêmes ne s’aventurent pas pour y faire leurs nids.

Les tribus dont nous parlons se sont établies dans les déserts méridionaux de l’Occident et de l’Orient : en Afrique, en Syrie, dans le Hidjaz, en Irac et en Kirman. Elles y mènent le même genre de vie que celui auquel leurs ancêtres, les descendants de Rebiâ, de Moder et de Kehlan, s’étaient adonnés dans les temps antérieurs à l’Islamisme. Pendant qu’elles s’y multiplièrent, l’empire arabe-musulman se désorganisa et tomba enfin dans la décrépitude qui l’attendait. Alors plusieurs familles de race étrangère, habitants des contrées de l’Orient et de l’Occident, atteignirent à la puissance et entrèrent au service de l’État. Ces nouveaux alliés obtinrent en récompense de leur dévouement le commandement des tribus dont ils faisaient partie, et reçurent des apanages composés de villes ou de certaines portions de la campagne et du Tell (les hauts plateaux). Favorisées de la sorte, ces familles s’élevèrent au rang de nations, et dominèrent par leur nombre les autres peuplades de la même origine. L’autorité dont elles étaient revêtues leur donna le moyen de se constituer en dynasties, et, à raison de cette circonstance, leurs histoire mérite de prendre place avec celle des Arabes, leurs prédécesseurs.

La langue arabe, telle qu’on la parlait dans la tribu de Moder, et qui, dans le Coran, offre une excellence de style qu’aucun


    Chrestomathie arabe, tome iii. (Voy. sur Seif-ed-Dola, prince d’Alep, la Biographie-Michaud, tome 41, page 485.)

  1. Le cata (tetrao alchata) dépose ses œufs dans le Désert et va à de très-grandes distances pour visiter les sources où il a l’habitude de se désaltérer. Jamais, disent les Arabes, il ne se trompe de chemin. (Voy. Chrestomathie, tome iii, page 416.)