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DOMINATION ARABE.

Koceila rassembla aussitôt ses Berbères et alla lui livrer bataille à Mems, dans la province de Cairouan. Des deux côtés l’on se battit avec un acharnement extrême, mais, à la fin, les Berbères prirent la fuite après avoir fait des pertes énormes. Koceila lui-même y trouva la mort. Les Arabes poursuivirent l’ennemi jusqu’à Mermadjenna, et de là, ils les chassèrent jusqu’au Molouïa. Cette bataille ayant coûté aux Berbères la fleur de leurs troupes, infanterie et cavalerie, brisa leur puissance, abaissa leur orgueil et fit disparaître à jamais l’influence des Francs. Cédant à la terreur que Zoheir et les Arabes leur inspiraient, les populations vaincues se réfugièrent dans les châteaux et les forteresses du pays.

Quelque temps après, Zoheir se jeta dans la dévotion, et ayant pris le chemin de l’Orient, il trouva la mort à Barca en combattant les infidèles. À la suite de cet événement, le feu de la révolte se propagea de nouveau par toute l’Ifrîkïa, mais la désunion se mit alors parmi les Berbères, chacun de leurs cheikhs se regardant comme prince indépendant.

Parmi leurs chefs les plus puissants, on remarqua surtout la Kahena, reine du Mont-Auras, et dont le vrai nom était Dihya, fille de Tabeta, fils de Tîfan[1]. Sa famille faisait partie des Djeraoua[2], tribu qui fournissait des rois et des chefs à tous les Berbères descendus d’el-Abter.

Le Khalife Abd-el-Mélek fit parvenir à Hassan-Ibn-en-Noman-el-Ghassani, gouverneur de l’Égypte, l’ordre de porter la guerre en Ifrîkïa, et il lui envoya les secours nécessaires pour cette entreprise. El-Hassan se mit en marche, l’an 69 (688-9), et entra à Cairouan d’où il alla emporter d’assaut la ville de Carthage. Les Francs qui s’y trouvaient encore passèrent alors en Sicile et en Espagne. Après cette victoire, Hassan demanda qui était le prince le plus redoutable parmi les Berbères, et ayant appris que c’était la Kahena, femme qui commandait à la puissante tribu des Djeraoua, il marcha contre elle et prit position sur le bord de la rivière Miskîana. La Kahena mena ses troupes

  1. L’orthographe de ces deux derniers noms est incertaine.
  2. Le texte arabe imprimé porte par erreur Hoouara.