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LV
INTRODUCTION.

marche pour Damas. Il se fit accompagner par les émirs, le fantôme de khalife qu’il tenait sous sa tutelle, les grands cadis des sectes de Chafaï, Malek et Hanbel ; laissant le cadi hanifite qui était malade. Il chargea l’émir Yeschbek de partir pour la même destination et d’emmener avec lui Ouéli-ed-dîn-Abd-er-Rahman-Ibn-Khaldoun.

Le jeudi, 6 du second rébi, le sultan fit son entrée à Damas et alla s’installer dans la citadelle ; mais, ayant appris que l’avant-garde de Tamerlan approchait de la ville, il sortit, le samedi suivant, pour aller à la rencontre de l’ennemi. Deux combats eurent lieu, et Tamerlan s’était presque décidé à en éviter un troisième et à évacuer la Syrie, quand plusieurs émirs, avec un nombre de mamlouks, abandonnèrent l’armée du sultan et prirent la route du Caire, dans l’intention, à ce qu’on a prétendu, de mettre sur le trône le scheikh Ladjîn. Consternés de cette trahison, les autres émirs enlevèrent le sultan, de nuit, à l’insu de l’armée, et le ramenèrent en Égypte. Alors cette armée se débanda, et il ne resta plus à Damas qu’une faible garnison. Les habitants de cette ville voulurent d’abord faire une vigoureuse résistance ; mais, se trouvant cernés de toute part, ils se décidèrent à envoyer le grand cadi Ibn-Mofleh, avec une députation de magistrats, de marchands et de notables, auprès de Tamerlan, afin de traiter avec lui. Comme le commandant de la garnison égyptienne refusa son consentement à tout arrangement et ne voulut même pas permettre à la députation de sortir de la ville, les envoyés se firent descendre du haut de la muraille, au moyen de cordes, et ils se rendirent au camp des assiégeants. Tamerlan, les ayant reçus, consentit à se retirer moyennant le paiement d’une forte contribution, et la paix fut conclue à cette condition. Mais, quand la somme lui fut livrée, il en exigea davantage. On eut alors l’imprudence de le laisser occuper une des portes de la ville par un détachement de troupes, chargé de maintenir l’ordre parmi les Tartars qui y entraient pour faire des achats, et Tamerlan profita de cette occasion pour s’emparer de la place. Il enleva aussitôt toutes les richesses des habitants ; un grand nombre d’entre eux périt dans des tourments affreux, le