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DE LA PHILOSOPHIE NATURELLE.

tances immenſes, en décroiſſant toujours dans la raiſon doublée des diſtances.

La gravité vers le Soleil eſt compoſée des gravités vers chacune de ſes particules, & elle décroît éxactement, en s’éloignant du Soleil, en raiſon doublée des diſtances, & cela juſqu’à l’orbe de Saturne, comme le repos des aphélies des planétes le prouve, & elle s’étend juſqu’aux dernieres aphélies des cométes, ſi ces aphélies ſont en repos.

Je n’ai pû encore parvenir à déduire des phénomenes la raiſon de ces propriétés de la gravité, & je n’imagine point d’hypothèſes. Car tout ce qui ne ſe déduit point des phénomenes eſt une hypothèſe : & les hypothèſes, ſoit métaphyſiques, ſoit phyſiques, ſoit mécaniques, ſoit celles des qualités occultes, ne doivent pas être reçues dans la philoſophie expérimentale.

Dans cette philoſophie, on tire les propoſitions des phénomenes, & on les rend enſuite générales par induction. C’eſt ainſi que l’impénétrabilité, la mobilité, la force des corps, les loix du mouvement, & celles de la gravité ont été connues. Et il ſuffit que la gravité éxiſte, qu’elle agiſſe ſelon les loix que nous avons expoſées, & qu’elle puiſſe expliquer tous les mouvemens des corps céleſtes & ceux de la mer.

Ce ſeroit ici le lieu d’ajouter quelque choſe ſur cette eſpéce d’eſprit très ſubtil qui pénétre à travers tous les corps ſolides, & qui eſt caché dans leur ſubſtance ; c’eſt par la force, & l’action de cet eſprit que les particules des corps s’attirent mutuellement aux plus petites diſtances, & qu’elles cohérent lorſqu’elles ſont contigues ; c’eſt par lui que les corps électriques agiſſent à de plus grandes diſtances, tant pour attirer que pour repouſſer les corpuſcules voiſins : & c’eſt encore par le moyen de cet eſprit que la lumiére émane, ſe réfléchit, s’infléchit, ſe réfracte, & échauffe les corps ; toutes les ſenſations ſont excitées, & les membres des animaux ſont mûs, quand leur volonté l’ordonne, par les vibrations