Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/49

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rettes, comme insensible aux cabrioles de l’équipage.

Enfin, on parvint à Avila, cette jolie petite ville de neuf mille habitants, entourée d’une ceinture de forêts.

À travers les chênes, les érables, les pins ou les landes couvertes de bruyères, le coche gagna la gare située à plus d’un kilomètre de la cité.

Là, Pierre, s’étant séparé de son voiturier, apprit que le train pour la direction de Médina, Valladolid, Burgos, Venta de Baños, Irun et France, devait passer dans une heure seulement. Une heure à dépenser, ma foi, ce ne serait pas trop de temps pour lire les journaux et se retremper quelque peu dans la vie parisienne.

Sur cette réflexion, le jeune homme s’installa commodément dans une salle d’attente et déplia l’un des quotidiens de Paris avec cette satisfaction mêlée de regrets que l’on éprouve à se replonger dans ses préoccupations accoutumées, après les avoir négligées quelque temps.

Mais il y eut à peine jeté les yeux qu’il pâlit, porta la main à son front tel un homme étourdi par un coup de massue.

— Elle, murmura-t-il, elle !

Et se dominant grâce à un effort violent :

— Le danger… C’est cela… Le bandit Selenitès avait raison.

Il avait vu ce sous-titre, imprimé en gros caractères, au-dessus d’un cliché reproduisant les traits charmants de Linérès :

Coïncidences diaboliques. — le jeu de massacre des épouseurs. — Un chapelet de victimes. — C’est diabolique, dit l’une d’elles. — Quoique non blessée, Mlle de Armencita n’en est par moins la plus atteinte. — Un journal parisien désigne la malheureuse jeune fille sous ce nom : La Fiancée du Diable !

Armencita ! Fiancée du Diable ! Ces mots avaient bouleversé Pierre, d’autant plus profondément que, lui aussi, avait éprouvé les effets des volontés mystérieuses s’agitant autour de la jeune fille.

Depuis son entretien avec la gitana, depuis la remise en ses mains du portrait de la señorita, est-ce qu’il ne se débattait pas en plein mystère ? Est-ce que les moindres incidents de son existence n’étaient