Page:Jacobus X - Le Marquis de Sade et son œuvre devant la science médicale et la littérature moderne, 1901.djvu/33

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qu’importe ? Si notre secret ne nous appartient plus, nous ne sommes plus assurés de vivre jusqu’à demain. Raphel parut embarrassé. Il eût. préféré retourner sur ses pas, amener des chevaux. Mais le soupçon d’une trahison le frappa. S’il en était ainsi, le départ le plus prompt serait le meilleur.

— Quand seras-tu prête ?

— Cette nuit.

— A quelle heure et à quel endroit nous trouverons-nous ? À son tour, Sibylle réfléchit. Après le couvre feu, toutes les portes du châleau étaient gardées, Profiter du sommeil de Fabrice n’était pas possible, à moins de corrompre des hommes de garde, moyen fort hasardeux. Il fallait comme la veille simuler une promenade sur le mont Ventoux et fuir avant le repas du soir.

-Mais, objecta Raphel, nous n’aurons pas marché pendant deux heures que l’on sera déjà à notre poursuite.

— Nous nous cacherons,

— N’auront-ils pas leurs chiens ?

Sibylle frémit. Ah ! balbutia-t-elle. Et elle vil d’un côté la vengeance de Fabrice sur leur tête, au château et à l’ermitage ; de l’autre, la meute féroce prète à les dévorer. Les seigneurs de ce temps avaient des chiens de guerre, des dogues plus terribles que des loups.

— O mon amour, dit-elle, je suis ton mauvais génie ! abandonne une femme qui ne peut que t’entraîner à l’abîme. Renonce à moi, Raphel, et disons-nous adieu. Autrement, ajoutat-elle en jetant ses beaux bras autour du cou de son amant, il ne nous reste plus que le choix de la mort.

— Tu dis vrai, dit soudain une voix sortie de l’oratoire, et le seigneur Fabrice apparut devant le couple adultère terrifié. Vétu du costume de cuir fauve qu’il portait à la chasse, sa dague nue à la main, il appuyait sur eux un regard pesant de haine et de cruelle ironie.