neur du regret. C’est Mme de Rupert qui sera de passage
dans la capitale.
—Comment ; son enthousiasme pour cette personne
dure encore ?
—Hélas, oui. C’est devenu, ma chère, une passion à
grand orchestre. Nous avons des jalousies, des exaltations
mystiques ; la religion y a un rôle, le remords met des
entraves, puis une phase contraire y succède ; l’on prie
ensemble, c’est-à-dire à la même heure, à deux cents
lieues de distance. Ma chère, en tout il y a de la mode
J’ai connu un temps, continua avec bonhomie Mme Berryer,
où les femmes adressaient ce genre de dévotion aux
étoiles et à la lune ; il paraît qu’on a changé tout cela. »
Ici un court silence donné aux souvenirs, puis, retournant
à Mme de Rupert:
« Que je voudrais, Elma, vous faire lire une de ces
lettres si incandescentes !
-J’avoue, madame, que si cela se pouvait faire honnêtement,
je m’en amuserais.
—On trouve beaucoup d’esprit à cette femme... de
l’imagination, d’accord ; mais elle est envahissante, fatigante...
et, convenons-en, mon amie, elle n’est ni belle,
ni jolie.
—Puisque telle est votre opinion, je ne vous contrarierai
pas sur ce point ; et je veux à ce sujet vous conter une
histoire, où j’ai joué un rôle très embarrassant.
« L’hiver dernier, à l’un des raouts de l’ambassade anglaise, j’aperçois M. Berryer circulant dans la foule et pilotant sa conquête. Il m’aborde, fait une présentation en règle ; nous échangeons quelques mots gracieux sur le désir de nous connaître ; puis tous deux se tournent vers le comte de la Ferronnays, l’arrêtant au passage. Au même instant, mon oncle le général, que vous connaissez bien, fond sur moi comme un cyclone, et, de cette voix qui fait merveille un jour de bataille, me crie : « Elma !