Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/145

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profession déterminée, à la médecine, à la théologie, à l’art de l’ingénieur, etc. Les autres, au contraire, veulent fonder de vastes écoles encyclopédiques dans lesquelles sera enseignée toute l’étendue du savoir humain et qui formeront des esprits universels et par là même libres. Ceux-ci sont pénétrés de l’esprit encyclopédique et humain du dix-huitième siècle qui a fait la Révolution française. Et c’est une chose saisissante de voir que dans notre pays, depuis un siècle, toutes les fois que l’esprit de liberté et de progrès se ranime, on revient à l’idée de fonder des Universités ; toutes les fois, au contraire, qu’il y a défaillance de la pensée française et des libertés publiques, on voit un despotisme sournois morceler l’enseignement supérieur en Facultés isolées et en écoles spéciales, pour le rabaisser à sa besogne professionnelle, et briser, en les dispersant, les forces de la pensée libre.

Dès 1789, Mirabeau veut instituer un Lycée national, une sorte d’institut de l’enseignement supérieur, comprenant les lettres, les sciences et les arts, et donnant à tous les groupes enseignants répartis sur le territoire un haut exemple d’unité et d’universalité. Le comité de la Constituante, dont Talleyrand est le rapporteur, s’inspire des grandes vues de Mirabeau, et il veut superposer à nos Facultés actuelles, considérées comme écoles professionnelles, un Institut encyclopédique, une Université. Le comité de l’Instruction