Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/349

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sonné ; le 21 mars, Jean de Bry ; le 4 avril, Delmas ; le 18 avril, Lasource (après la perfide attaque contre Danton) ; le 2 mai, Boyer-Fonfrède, et le 16 mai, le furieux Isnard. (Voir la liste des présidents de la Convention dressée par Aulard.)

Sans doute, la majorité échappait à la Gironde quand il fallait prendre des mesures vigoureuses pour le salut de la Révolution. Alors les hommes du centre, avec Barère, se portaient à l’extrême gauche, et pour la mort du roi, contre l’appel au peuple, pour l’emprunt forcé ; ils faisaient une majorité avec la Montagne. Mais ils se retournaient contre celle-ci toutes les fois que s’alliant à la Commune elle paraissait vouloir peser sur la Convention. Le centre, parti d’équilibre, voulait maintenir les deux forces extrêmes entre lesquelles il évoluait et il se rejetait vers la Gironde quand celle-ci semblait menacée. Levasseur a expliqué avec une grande netteté et une grande force ce jeu des partis de la Convention.

« Le maximum fut adopté, en dépit des discours de quelques Girondins. Une partie du côté droit vota avec nous dans cette question. Dira-t-on encore que la majorité fut opprimée par les violences du dehors ? Un seul mot répond à cette assertion. Les Girondins avaient toujours la majorité quand il s’agissait de querelles de parti, et c’étaient cependant là les questions les plus irritantes, celles qui pouvaient exciter des mouvements populaires, celles enfin au sujet desquelles on pouvait chercher à intimider les faibles. Pourquoi emportions-nous toutes les mesures d’utilité générale ? Quand on délibéra sur l’accusation de Marat, sur les troubles de mars, sur les pétitions des sections, sur la commission des douze, la Gironde eut la majorité. Pourquoi la force nous resta-t-elle quand on soumit au vote de la Convention le maximum, les moyens de recrutement révolutionnaire, le tribunal extraordinaire, l’emprunt forcé, etc. ? C’est évidemment parce que nos adversaires réunissaient leur ban et leur arrière-ban pour les débats de parti et que nous songions aux affaires de la France. C’est qu’ennemis par position de la Montagne, la droite et le Marais se coalisaient pour nous faire une guerre acharnée, tandis que tout ce qu’il y avait sur leurs bancs de sincères amis de la Révolution volaient avec nous dans tout ce qui intéressait le salut public. La Gironde trouvait au reste un certain intérêt à nous laisser ainsi la direction des affaires tout en nous opprimant. On pouvait ainsi nous faire passer pour les oppresseurs ; en même temps tout l’honneur des mesures qui réussissaient, telle que la puissance imposante donnée à nos quatorze armées, restait de droit et de fait à la majorité, tandis qu’on rejetait sur nous seuls les maux attachés aux mesures acerbes, mais transitoirement nécessaires, telles que le maximum et le tribunal révolutionnaire. »

Ainsi on ne pouvait attendre un dénouement légal de la crise, et seule la force pouvait la résoudre. Les Jacobins, suivant le conseil de Danton,