Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/479

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relativement au bruit qui se répand qu’il se trame un complot contre la liberté. »

Cela veut dire, sans doute, que le peuple, excité par quelques perfides, pourrait se porter tumultueusement contre la Convention afin de venger la liberté en péril, et que cette démarche téméraire fournirait le prétexte souhaité à ceux qui veulent écraser, par la force, la Révolution. C’est toujours la même tactique de fermeté légale, la même crainte des hasards de l’insurrection. Cependant, voici, après les volontaires de la section révolutionnaire de l’Unité, ceux de la section révolutionnaire des Gravilliers :

« Leur bataillon se présente pour recevoir un drapeau, étant au moment de partir pour la Vendée ; une députation de la Commune va au-devant de lui, et le vice-président lui remet le drapeau. Ensuite, il donne, au nom du Conseil, l’accolade fraternelle au commandant de ce bataillon. Une députation descend sur la place de la Maison commune pour y recevoir le serment des volontaires, qui a été prêté avec le plus vif enthousiasme, au milieu des applaudissements des citoyens et des cris de : Vive la République ! »

Ainsi la Commune ne croit pas devoir retenir à Paris les forces d’action révolutionnaire. Elle songe à la Vendée menacée, au fanatisme de l’Ouest qui s’étend ; et c’est là-bas qu’elle envoie les volontaires des quartiers les plus ardents : les fils, les frères des Enragés de la section des Gravilliers sont soulevés par l’enthousiasme de la liberté et de la patrie.

Enfin, comme pour attester de nouveau sa déférence aux décisions légales de la Convention, le Conseil de la Commune, sur le réquisitoire de son procureur, ordonne la transcription sur ses registres et l’exécution du décret qui mettait Paris sous la sauvegarde des citoyens et qui ligottait les sections révolutionnaires.

Marino et Michel ayant été relâchés sous la réserve qu’ils seraient toujours à la disposition de la Commission des Douze, Hébert et Varlet demeuraient seuls en état d’arrestation. L’émoi du peuple fut-il vif ? Au sujet de Varlet, les impressions étaient très mêlées et très défiantes. Son action, dans les journées de février et de mars, était suspecte à beaucoup de patriotes. De plus, son agitation presque maladive (et qui bientôt s’aggrava jusqu’à la folie), son goût de la réclame, sa vanité inquiète laissaient au cœur du peuple je ne sais quel malaise. Il s’arrêtait un moment autour des tribunes mobiles qu’installait en plein vent le fiévreux agitateur, mais il reprenait vite son chemin, et ne se livrait pas. Désavoué par Marat, exclu par les Jacobins, Varlet était réduit à chercher une sorte de réhabilitation révolutionnaire dans la guerre de Vendée quand les Douze mirent la main sur lui.

Dutard écrit le 25 mai à Marat (à dix heures du matin et avant de connaître l’arrestation de Varlet qui fut faite dans la nuit du 24 au 25) :

« J’ai entendu, hier soir, M. Varlé (Varlet) pérorer pendant une heure sur la terrasse du château devant la grande porte. Il y a débité sous une forme