Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/635

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collèges ; mais Platon ne faisait que des philosophes ; Lycurgue ne faisait que des soldats ; nos professeurs ne faisaient que des écoliers. La République française, dont la splendeur consiste dans le commerce, l’industrie et l’agriculture, a besoin de faire des hommes de tous les états ; alors, ce n’est plus dans les écoles qu’il faut les renfermer, c’est dans divers ateliers, c’est sur la surface des campagnes qu’il faut les répandre ; toute autre idée est une chimère qui, sous l’apparence trompeuse de la perfection, paralyserait des bras nécessaires, anéantirait l’industrie, amaigrirait le corps social, et bientôt en opérerait la dissolution. »

Mais, comment réaliser ce plan ainsi limité ? Lepelletier accorde des délais, mais il pose le principe de l’obligation :

« Ici s’élève une question très importante.

« L’instruction publique des enfants sera-t-elle d’obligation pour les parents, ou les parents auront-ils seulement la faculté de profiter de ce bienfait national ?

« D’après les principes, tous doivent y être obligés.

« Pour l’intérêt public, tous doivent y être obligés.

« Dans peu d’années, tous doivent y être obligés.

« Mais dans le moment actuel, il vous semblera peut-être convenable d’accoutumer insensiblement les esprits à la pureté des maximes de notre nouvelle constitution, je ne vous le propose qu’à regret ; je soumets à votre sagesse une modification que mon désir intime est que vous ne jugiez pas nécessaire. Elle consiste à décréter que d’ici à quatre ans, l’instruction publique ne sera que facultative pour les parents. Mais, ce délai expiré, lorsque nous aurons acquis, si je puis m’exprimer ainsi, la force et la maturité républicaines, je demande que quiconque refusera ses enfants à l’institution commune, soit privé de l’exercice des droits de citoyen pendant tout le temps qu’il se sera soustrait à remplir ce devoir civique et qu’il paie, en outre, double contribution dans la taxe des enfants, dont je vous parlerai dans la suite.

« Il vous sera facile de placer ces établissements dans les édifices appartenant à la nation, maisons religieuses, habitations d’émigrés et autres propriétés publiques.

« Je voudrais encore qu’à défaut de cette ressource, les vieilles citadelles de la féodalité s’ouvrissent pour cette intéressante destination. De toutes parts l’on murmure et l’on réclame contre l’existence de ces châteaux et de ces tours, monuments odieux d’oppression. Au lieu de les détruire, employons utilement leur masse antique.

« Dans un canton composé communément de huit paroisses, la nation pourra choisir entre plusieurs, tout en dédommageant le propriétaire ; elle se procurera encore à peu de frais un local étendu ; elle fera sortir des mains de simples citoyens des palais qui offensent l’œil sévère de l’égalité ; et ce