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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/140

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fait entendre ce mot de captivité, il sent que ce terme est trop dur, et, vite, il le corrige, il ajoute : « Pour le soumettre à l’obéissance de Jésus-Christ » ; après la captivité, la liberté ; après la mort, la vie ; après la perdition, le salut. Car nous ne venons pas seulement pour terrasser, nous venons surtout pour transformer, pour conquérir nos adversaires à la vérité. « Ayant en notre main le pouvoir de punir toute désobéissance, lorsque vous aurez satisfait à tout ce que l’obéissance demande de vous (6) ». Ici ce n’est pas les coupables seulement qu’il remplit de crainte, mais il intimide les autres avec eux. C’est vous, dit-il, que nous attendons ; quand nos avertissements, nos menaces vous auront redressés, purifiés, séparés de tout commerce avec les coupables, quand les malades incurables seront dans leur isolement, alors nous sévirons, attendant pour cela que vous vous soyez franchement séparés. Vous obéissez sans doute maintenant, mais votre obéissance n’est point parfaite. Mais, dira-t-on, si vous agissiez tout de suite, il y aurait une plus grande utilité. Nullement : car si j’agissais tout de suite, je vous envelopperais dans la punition. Mais vous deviez châtier les autres et nous épargner. Mais si je vous épargnais, on pourrait m’accuser de partialité : je ne veux rien faire, quant à présent, je veux d’abord vous redresser, et ensuite c’est aux autres que j’irai parler.
Est-il possible de mieux prouver la tendresse qu’on porte dans ses entrailles ? Il voit ses fidèles compromis par un indigne commerce, il veut frapper les coupables, mais il s’arrête, il contient son indignation ; il donne aux siens le temps de se retirer, pour n’avoir à frapper que ceux qu’il faut punir ; disons mieux, pour n’avoir même pas à les frapper eux-mêmes. Car s’il les menace, s’il dit ne vouloir recouvrer que les vrais fidèles, c’est pour que les autres, corrigés par la crainte, reviennent à résipiscence, c’est pour n’avoir à faire tomber sur personne le feu de sa colère. C’était un médecin excellent, un bon père étendant ses soins sur tous, un protecteur, un curateur plein de zèle, attentif à tous les intérêts, écartant tous les obstacles, réprimant les hommes dangereux, se montrant partout à la fois pour veiller au salut de tous. Et ce n’était pas en livrant des combats qu’il achevait ainsi les affaires, il courait toujours comme à une prompte victoire, à un triomphe tout préparé, n’ayant qu’à dresser des trophées, renversant d’un coup de main les forteresses du démon, les machines des mauvais anges, et transportant son butin tout d’un trait dans le camp du Christ ; il ne se donnait pas le temps de reprendre haleine ; de tels peuples soumis, il s’élançait d’un bond vers d’autres peuples ; de ces derniers, vers d’autres peuples encore, comme un général victorieux qui ne passe pas un jour, ce n’est pas assez dire, qui ne passe pas une heure sans ériger de nouveaux trophées. Entré dans la mêlée sans avoir rien sur lui qu’une méchante tunique, il prenait les villes des ennemis avec tous leurs habitants, et pour arcs, pour lances, pour flèches, pour toute arme, Paul n’avait que sa langue. Il lui suffisait de parler, et ses discours tombaient sur les ennemis avec plus de force dévorante que le feu, et il chassait les démons, et il ramenait à lui les hommes que les démons retenaient prisonniers. Quand l’apôtre mettait en fuite cet exécrable Satan, on vit cinquante milliers de magiciens se réunir, brûler les livres de sorcellerie, et revenir à la vérité. Comme il arrive, au sein d’une guerre, lorsqu’une tour s’écroule, lorsqu’un tyran est renversé, que tous ses partisans jettent leurs armes, se rendent au général de l’armée victorieuse, le même fait se produisit alors. Le démon était terrassé, on vit alors tous ceux qu’il tenait assiégés, jeter loin d’eux leurs livres, ou plutôt les détruire, et accourir vers Paul pour tomber à ses pieds ; et lui, tenant tête à l’univers, comme si toute la terre n’eût été pour lui qu’une armée ennemie, ne s’arrêtant jamais, on eût dit qu’il avait des ailes, et toujours, et partout, il faisait seul toutes choses, tantôt redressant un boiteux, tantôt ressuscitant un mort, tantôt frappant de cécité un magicien ; même en prison son activité ne se reposait pas, il attirait à lui son geôlier, le prisonnier faisait alors cette glorieuse prise.
Sachons donc l’imiter, nous aussi, dans la mesure de nos forces. Mais que dis-je, dans la mesure de nos forces ? Il nous est permis de nous approcher de lui, nous n’avons qu’à le vouloir, nous pouvons contempler sa vertu dans les combats, imiter son courage. Aujourd’hui encore, l’apôtre continue son œuvre, détruisant les raisonnements humains, et tout ce qui s’élève avec hauteur contre la science de Dieu. Un grand nombre d’hérétiques ont entrepris de le déchirer, et Paul, même en