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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/158

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plus il donne de netteté à ses expressions. Ensuite comme il ne veut pas qu’on le prenne absolument pour un insensé, il dit « Dans ce que je prends pour un sujet de me glorifier ». En cela seulement, dit-il ; c’est avec une restriction du même genre qu’il dit ailleurs « Afin que nous ne soyons pas confondus » ; il dit de même ici. « Dans ce que je prends pour un sujet de me glorifier ». Ailleurs il dit encore. « Est-ce selon la chair que je fais les desseins que je fais, de telle sorte que l’on trouve également en moi oui, oui ; non, non ? » et après avoir montré qu’il ne peut pas remplir toujours toutes les promesses qu’il faisait d’aller visiter les Églises parce qu’il ne prend pas de résolutions selon la chair, pour empêcher qu’on ne soupçonnât aussi son enseignement d’inconstance et de variabilité, il dit : « Mais Dieu qui est véritable, m’est témoin qu’il n’y a point eu de oui et de non dans la parole que je vous ai annoncée ». (2Cor. 1,17-18)
2. Voyez après combien de préliminaires il apporte encore d’autres motifs d’excuse ; entendez-le ajoutant, disant : « Puisque plusieurs se glorifient selon la chair, je puis bien aussi me glorifier comme eux (18) ». Qu’est-ce que cela veut dire : « Selon la chair ? » C’est-à-dire, de choses extérieures, de leur noblesse, de leurs ressources, de leur science, de ce qu’ils sont circoncis, de ce qu’ils ont pour ancêtres des Hébreux, de la gloire dont ils jouissent auprès de la multitude. Voyez l’adresse de Paul : il étale d’abord ces biens qui ne sont rien, pour amener le mot de folie qu’il met ensuite. S’il y a de l’imprudence à se glorifier à propos des biens réels, à plus forte raison y en a-t-il à propos de ceux qui ne sont rien. Et c’est ce qu’il dit, « n’être pas conforme à la loi du Seigneur ». En effet, il ne sert à rien d’être Hébreu, ni de jouir d’autres avantages du même genre. N’allez donc pas vous imaginer que je considère ces titres comme des vertus ; mais puisque ces gens-là s’en glorifient, je suis bien forcé d’établir là-dessus ma comparaison avec eux ; c’est ce que fait l’apôtre dans d’autres circonstances encore : « Si quelqu’un croit pouvoir prendre avantage de ce qui n’est que charnel, je le puis encore plus que lui ». (Phil. 3,4) L’apôtre parle ainsi à cause de ceux qui prenaient ainsi leurs avantages. Supposez un homme d’une brillante naissance, ayant embrassé la pratique de la sagesse, et qui enverrait d’autres enorgueillis de leur noble origine ; pour rabaisser leur vanité, il serait forcé dé parler de l’illustration de sa race à lui, ce qu’il ferait non par désir de se vanter, mais afin de rappeler les autres à l’humilité. C’est ce que fait Paul. Ensuite, laissant de côté ces vaniteux, il ne s’attaque plus qu’aux Corinthiens.
« Vous souffrez sans peine les imprudents (19) ». C’est donc vous qui êtes cause de ces désordres, encore plus que ces faux apôtres. Si vous ne les supportiez pas, si le mal qu’ils vous font ne venait que d’eux, je n’aurais rien à dire ; mais c’est votre salut qui m’inquiète, et je condescends à votre faiblesse : Voyez comme il mêle à la réprimande un éloge après avoir dit : « Vous souffrez sans peine les imprudents », il ajoute : « étant vous-mêmes sages ». C’est de l’imprudence que de se glorifier pour de pareils sujets. Sans doute il pouvait les réprimander ouvertement, leur dire : Ne supportez pas les imprudents ; mais la réprimande, telle qu’il la formule, a plus d’éloquence. En s’y prenant autrement il eût paru ne les réprimander que parce qu’il était privé des mêmes avantages ; au lieu qu’en se montrant, même au point de vue de ces avantages, supérieur à ses adversaires, et en disant qu’il dédaigne de pareils titres, ses paroles ont plus de force pour corriger. D’ailleurs, avant de commencer son éloge et d’entreprendre la comparaison qui lui donne la supériorité, il reproche aux Corinthiens la bassesse qui les courbe devant ces hommes.
Voyez comme il les raille : « Vous souffrez », dit-il, « qu’on vous mange (20) ». Mais alors, ô Paul, comment avez-vous pu dire : « A. ceux qui se glorifient de faire comme nous ? » Voyez-vous comme il les montre ne se faisant pas faute de recevoir, et non seulement de recevoir, mais au-delà de toute mesure ? car c’est ce que signifie manger. « Qu’on vous asservisse ». Vos fortunes, dit-il, et vos personnes, et votre liberté, vous avez tout livré. Certes voilà qui est plus fort que de recevoir, ce n’est pas seulement de vos fortunes, mais de vos personnes mêmes qu’ils sont les maîtres. C’est ce qu’il fait voir auparavant par ces paroles : « Si d’autres usent de ce pouvoir à votre égard, pourquoi ne pourrions-nous pas, en user plutôt qu’eux ? » (1Cor. 9,12) Vient ensuite ce qui est plus grave : « Qu’on vous traite avec hauteur ». Votre servitude est extrême, vos