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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/192

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pas du tout de faire servir sa puissance à leur châtiment, car il ajoute : « Pour édifier et non a pour détruire ». Cette pensée, il ne l’indique qu’à mots couverts, comme je l’ai remarqué ; mais voici une autre pensée, qu’il a livrée à leurs réflexions : c’est que, s’ils demeurent incorrigibles, c’est faire une œuvre d’édification que de châtier de pareilles dispositions. C’est la vérité, l’apôtre ne l’ignore pas, et il a donné des preuves réelles de cette vérité. « Enfin, mes frères, soyez dans la joie, travaillez à être parfaits, consolez-vous, soyez unis d’esprit, vivez en paix ; et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous (44) ». Qu’est-ce à dire : « Enfin, mes frères, réjouissez-vous ? » Vous nous avez affligés, remplis de craintes, d’angoisses, vous nous avez dit d’avoir peur, de trembler, comment pouvez-vous nous inviter à nous réjouir ? C’est précisément pour cette raison que je vous invite à vous réjouir. Si, en effet, votre conduite répond à mes avertissements, rien ne viendra troubler la joie. J’ai fait tout ce qui dépendait de moi j’ai montré de la patience, j’ai attendu, je n’ai rien brusqué, j’ai exhorté, conseillé, inspiré la crainte, menacé, employé tous les moyens pour vous porter à cueillir le fruit du repentir. Ce qu’il faut maintenant, c’est que vous fassiez ce qui dépend de vous, et, de cette manière, votre joie ne se flétrira pas, « Travaillez à être parfaits ». Qu’est-ce que cela veut dire : « Travaillez à être parfaits ? » Devenez des hommes complets, remplissez-vous de ce qui vous manque.— Consolez-vous.— Comme les épreuves étaient grandes, comme les dangers étaient considérables, « Consolez-vous », leur dit-il, les uns les autres, et auprès de nous, et en vous corrigeant, en vous améliorant. Si la joie vient de la conscience, si vous êtes parfaits, rien ne manque à votre tranquillité, à votre consolation. Rien, en effet, ne console tant' qu’une conscience pure, quand les épreuves tomberaient sur nous par milliers. « Soyez unis d’esprit, vivez en paix » ; ce qu’il demandait dans la première épître, dès les premiers mots. Il peut se faire qu’il y ait accord dans les esprits, et qu’on ne vive pas en paix, comme dans le cas où l’on est d’accord sur l’enseignement de la foi, mais divisé par les affaires. Paul tient à l’union des esprits et à la paix tout ensemble. « Et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous ». L’apôtre ne se contente pas d’exhortations, d’avertissements, il y joint encore ses vœux. Ou il exprime les vœux qu’il forme, ou il prédit ce qui arrivera ; croyons plutôt qu’il fait, à la fois, les deux choses. Si vous tenez cette conduite, dit-il, ce qui signifie, si vous êtes unis d’esprit, si vous vivez en paix, Dieu sera avec vous ; car c’est le Dieu d’amour et de paix, ce sont là les biens qui le réjouissent et qui lui plaisent. Par là aussi vous aurez la paix qui vient de son amour ; par là, vous serez délivrés de tous les maux. C’est l’amour, de Dieu qui a sauvé la terre, quia terminé la guerre commencée depuis si longtemps, qui a mêlé la terre et le ciel, qui a fait que les hommes sont devenus des anges. Donc aimons-le, cet amour, nous aussi ; car d’innombrables biens sont les fruits de cet amour. C’est par lui que nous avons été sauvés, c’est par lui que nous viennent tous les présents d’un ineffable prix. Ensuite, pour provoquer cet amour au milieu des fidèles « Saluez-vous les uns les autres par un saint baiser (43) ». Qu’est-ce à dire « Saint ? » Non pas un baiser trompeur, perfide, comme celui de Judas à Jésus-Christ. Si le baiser nous a été donné, c’est pour être le foyer où s’embrase l’amour, pour enflammer l’affection, pour que nous nous aimions les uns les autres, comme les frères aiment leurs frères ; comme les enfants aiment leurs – pères ; comme les pères aiment leurs enfants ; ou plutôt d’un amour bien plus vif ; ces sentiments-là viennent de la nature ; les autres de la grâce. Voilà comment les âmes se lient entre elles, et voilà pourquoi, au retour d’un voyage, nous nous donnons le baiser mutuel, les âmes s’empressent de se réunir. La bouche est de tous nos organes, celui qui se plait le plus naturellement à déclarer l’amour.
2. On peut encore, à propos de ce saint baiser, faire une autre réflexion. Quelle est-elle ? Nous sommes le temple de Jésus-Christ, (2Cor. 6,16) ; ce sont donc les vestibules, le portique du temple que nous baisons, quand nous nous donnons les uns aux autres le baiser mutuel. Ne voyez-vous pas combien de personnes baisent les vestibules mêmes de cette église, les uns abaissant leur tête, les autres y appuyant leur main, et approchant leur main de leur bouche ? C’est par ces issues, par ces portes qu’est entre le Christ, qu’il entre pour venir à nous dans la communion. Vous qui participez aux mystères, vous savez ce que