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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/193

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je dis. Ce n’est pas un honneur vulgaire qui est fait à notre bouche, lorsqu’elle reçoit le corps du souverain Maître. Voilà surtout pourquoi nous donnons le baiser. Écoutez nos paroles, vous qui faites entendre des choses honteuses, vous qui proférez des outrages, et frémissez d’horreur en pensant quelle est cette bouche que vous déshonorez ; écoutez, vous qui donnez de honteux baisers ; écoutez les oracles que Dieu a prononcés par une bouche comme la vôtre, et sachez donc conserver votre bouche pure de toute souillure. Il a parlé de la vie à venir, de la résurrection, de l’immortalité, de la mort qui n’est pas une mort, de mille autres vérités ineffables. C’est comme un sanctuaire d’où partent des oracles, que la bouche du prêtre, pour celui qui doit être initié.
Écoutons tout ce qui est rempli de redoutables mystères. Cet homme, depuis les temps de ses premiers parents, a perdu ce qui fait la vie, il s’approche pour redemander sa vie, il interroge pour savoir quels sont les moyens de la retrouver, de la reconquérir. Alors Dieu lui fait entendre, par ses oracles, comment on trouve la vie, et la bouche du prêtre est plus saintement redoutable que le propitiatoire même. Car ce propitiatoire antique ne faisait jamais entendre une voix pareille ; il ne s’agissait pour lui que d’intérêts bien moindres, des guerres et de la paix d’ici-bas ; mais chez nous, on ne parle que du ciel, et de la vie future, et de choses nouvelles, et qui dépassent les esprits. Après avoir dit : « Saluez-vous les uns les autres, par un saint baiser », l’apôtre ajoute : « Tous les saints vous saluent », voulant encore, par ces paroles, leur donner de bonnes espérances. C’est pour leur tenir lieu du saint baiser ; il se sert de la formule de la salutation, pour les réunir tous ensemble ; c’est la même bouche qui donne le baiser et qui fait entendre ces paroles. Voyez-vous comment l’apôtre les réunit tous, aussi bien ceux que séparent de longues distances, que ceux qui vivent les uns auprès des autres, et cela, soit par le baiser, soit par ses lettres ? « Que la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et l’amour de Dieu le Père, et la communication du Saint-Esprit soit avec vous tous. Amen (13) ». Après les salutations, les baisers, dont le but est d’opérer l’union des fidèles, vient, pour terminer, une prière pour cimenter l’union des fidèles avec Dieu.
Où sont maintenant ceux qui disent que le Saint-Esprit n’ayant pas été nommé au commencement des épîtres n’est pas de la même substance ? Le voilà nommé maintenant avec le Père et le Fils. Indépendamment de cette réflexion, on peut en faire une autre, c’est que l’apôtre dit, dans son épître aux Colossiens : « Que la grâce et la paix vous soient données par Dieu notre Père » (Col. 1,3) ; et il passe le Fils sous silence, et il n’ajoute pas, comme dans toutes les épîtres, et par Notre-Seigneur Jésus-Christ. Sera-ce donc une raison pour que le Fils ne soit pas non plus de la même substance ? Mais c’est le comble de la démence. Car ce qui prouve le plus que le Fils est de la même substance, c’est la diversité même des phrases de Paul. Nous n’exprimons pas ici une simple conjecture ; voyez dans quelles circonstances il nomme le Fils et l’Esprit, en passant le Père sous silence. Il écrit aux Corinthiens et leur dit : « Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et dans l’Esprit de notre Dieu ». (1Cor. 6,11) Eh quoi donc, répondez-moi, n’avaient ils pas été baptisés au nom du Père ? Donc ils n’avaient été ni lavés ni sanctifiés. Mais ils avaient été baptisés, baptisés, par conséquent, comme le sont ceux qu’on baptise. Comment donc se fait-il que l’apôtre n’ait pas ajouté : vous avez été lavés au nom du Père ? C’est qu’il lui est indifférent de mentionner tantôt telle personne, tantôt telle autre, et vous trouverez la preuve du peu d’importance que l’apôtre y attache dans un grand nombre de passages des épîtres. En effet, il écrit aux Romains : « Je vous conjure donc, par la miséricorde de Dieu » (Rom. 12,1) ; assurément la miséricorde appartient également au Fils ; et : « Je vous conjure ; par la charité du Saint-Esprit » (Rom. 15,30) ; assurément la charité appartient également au Père. Pourquoi donc ne parle-t-il pas de la miséricorde du Fils, ni de la charité du Père ? Parce que ce sont des vérités évidentes, reconnues de tous. De là son silence. On trouvera aussi, à propos des dons divins, la même indifférence dans les paroles. Car en disant : « Que la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et l’amour de Dieu le Père, et la communication du Saint-Esprit », il n’en dit pas moins ailleurs la communication du Fils et l’amour de l’Esprit. Car « Je vous conjure », dit-il, par