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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/226

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Trésor certainement tenu en réserve, par la faute du coupable, et non par celle du juge. « Tu t’amasses un trésor », toi, et non Dieu. Car il a fait tout ce qu’il fallait faire, il t’a donné la connaissance du bien et du mal, il s’est montré patient, il t’a invité à la pénitence, il t’a menacé d’un avenir terrible, il a employé tous les moyens pour t’amener à résipiscence ; si tu t’obstines à résister « tu t’amasses un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation et du juste jugement de Dieu ». Et pour que ce mot de colère n’éveille pas en vous l’idée de la passion, il a soin d’ajouter : « Du juste jugement de Dieu ». Et il a raison de dire : « De la manifestation » ; car la révélation aura lieu quand chacun sera traité selon ses mérites. Ici-bas souvent un grand nombre commettent des, injustices ou tendent des pièges contre les lois de l’équité ; là il n’en sera pas ainsi. « Qui rendra à chacun selon ses œuvres ; à ceux qui par leur persévérance dans les bonnes œuvres, etc. (6,7) ».
3. Après s’être montré terrible et sévère, en parlant du jugement et des peines futures, contre toute attente, au lieu d’insister sur le supplice, il revient tout à coup à un sujet plus doux, à la récompense des bons, et dit : « A ceux qui par la persévérance dans les bonnes œuvres cherchent la gloire, l’honneur, et l’immortalité ; la vie éternelle ». Ici il relève ceux qui avaient failli dans les tentations et leur montre qu’il ne faut pas se fier à la foi seule ; car, devant ce tribunal, les actions aussi sont examinées. Et voyez comment, en parlant de l’avenir, il ne peut expliquer clairement en quoi consistent ces biens, mais parle de gloire et d’honneur. En effet, comme ces biens surpassent tous les biens terrestres, il ne trouve rien qui puisse en donner l’image ; mais il leur applique comme il peut le nom des choses qui brillent le plus à nos yeux, la gloire, l’honneur, la vie : car voilà surtout ce que les hommes recherchent. Mais tels ne sont pas les biens du ciel, qui l’emportent d’autant plus sur ceux-ci qu’ils sont incorruptibles et immortels.
Voyez-vous comme, en parlant d’incorruptibilité, il nous ouvre la porte pour traiter de la résurrection du corps ? Car cette incorruptibilité concerne ce corps de corruption. Et comme ce n’était pas assez, il y ajoute la gloire et l’honneur. Car tous nous ressusciterons incorruptibles, mais non tous pour la gloire-: les uns pour le supplice, les autres pour la gloire. « Mais », continue-t-il, « à ceux qui ont l’esprit de contention (8) » ; il refuse de nouveau le pardon à ceux qui vivent dans le vice, et montre qu’ils y sont tombés par un certain esprit de contention et par lâcheté. « Qui ne se rendent pas à la vérité, mais qui acquiescent à l’iniquité ». Autre accusation. Quelle sera en effet l’excuse de celui qui fuit la lumière et préfère les ténèbres ? Il ne dit pas : qui sont contraints par violence ou par tyrannie, mais « qui acquiescent à l’iniquité » ; pour vous apprendre que la chute est volontaire, et non l’effet de la nécessité. « Tribulation et angoisse à l’âme de tout homme qui fait le mal (9) » ; c’est-à-dire qu’on soit riche, consul, roi, le jugement n’en tiendra aucun compte ; là les dignités ne tiendront point de place.
Après avoir décrit l’excès de la maladie, en avoir signalé la source, à savoir la lâcheté de ceux qui en sont atteints ; puis indiqué le terme, qui est la perdition, et la facilité de s’en guérir, il fait retomber principalement sur le Juif le poids du châtiment. « Du Juif d’abord, puis du Grec ». Car celui qui a en la plus grande part à la doctrine, doit, s’il prévarique, avoir aussi la plus grande part au châtiment. Ainsi plus nous sommes éclairés ou puissants, plus nos fautes seront punies. En effet si vous êtes riche, on exigera de vous plus d’aumônes que d’un pauvre ; si vous êtes plus intelligent, plus de soumission ; si vous êtes revêtu de la puissance, des œuvres plus éclatantes ; en tout et partout, vous devez produire selon vos forces et votre capacité.
« Mais gloire, honneur et paix à quiconque fait le bien, au Juif d’abord, puis au Grec (10) ». De quel Juif, de quels grecs parle-t-il ici ? De ceux qui ont existé avant le Christ ; car il ne parle point encore du temps de grâce, mais des temps qui ont précédé, faisant disparaître d’avance et de loin la différence entre le Grec et le Juif, afin que la chose ne paraisse plus nouvelle ni pénible, quand il s’agira du temps de grâce. En effet si dans les âges antérieurs, quand la grâce n’avait point encore brillé d’un tel éclat, quand la nation juive était honorable, illustre et glorieuse entre toutes, si déjà il n’y avait pas de différence, qu’aura-t-on à dire après qu’une si grande grâce se sera manifestée ? Aussi met-il le plus grand intérêt à prouver ce point. Et l’auditeur