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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/260

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patriarche ; bien plus, chose étonnante ! il le place fort au-dessus. Telle est, en effet, notre noblesse, que la foi d’Abraham est devenue la figure de la nôtre. Paul ne dit pas : Si cela lui a été imputé à justice, il est probable qu’il nous sera aussi imputé ; il ne s’appuie pas sur un raisonnement humain ; mais il parle d’après l’autorité des lois divines et réduit tout à une sentence de l’Écriture. Pourquoi, nous dit-il, cela est-il écrit, sinon pour nous apprendre que nous avons été justifiés de la même manière ? Car nous croyons au même Dieu, pour les mêmes objets, quoique non dans les mêmes personnes. Mais en parlant de notre foi, il parle aussi de l’immense bonté de Dieu, qu’il nous remet sans cesse sous les yeux, en rappelant le souvenir de la croix : ce qu’il fait ici en ces termes : « Qui a été livré pour nos péchés, et qui est ressuscité pour notre justification ».
Voyez comment après avoir marqué la cause de la mort du Sauveur, il en tire une démonstration de sa résurrection. Pourquoi, dit-il, Jésus a-t-il été crucifié ? Ce n’est pas peur ses péchés, comme sa résurrection le prouvé. Car s’il eût été pécheur, comment serait-il ressuscité ? Sa résurrection prouve donc clairement qu’il n’était point pécheur. Mais s’il ne l’était point, comment a-t-il raté crucifié ? Pour d’autres. Si c’est pour d’autres, il est nécessairement ressuscité. Et pour que vous ne disiez pas : Comment, nous qui sommes si coupables, pouvons-nous être justifiés ? Paul nous montre celui qui a effacé tous les péchés ; afin de prouver ce qu’il avance et par la foi d’Abraham, en vertu de laquelle il a été justifié ; et par la passion du Sauveur, qui nous a délivrés de nos péchés. Après avoir donc parlé de sa mort, il parle aussi de sa résurrection. Il n’est pas mort pour nous laisser exposés au châtiment et condamnés, mais pour nous faire du bien ; c’est pour nous rendre justes qu’il est mort et ressuscité.
« Étant donc justifiés par la foi, ayons la paix avec Dieu par. Notre-Seigneur Jésus-Christ (1) ». Que veulent dire ces mots : « Ayons la paix ? » C’est-à-dire, selon quelques-uns, ne causons point de discordes, en cherchant à introduire la loi. Quant à moi, je pense qu’il s’agit ici de notre conduite. Après avoir beaucoup parlé de la foi et de la justice par les œuvres, il traite cette autre question ; et de peur qu’on ne s’autorise de ce qu’il a dit : pour se négliger, il ajoute : « Ayons la paix », c’est-à-dire ne péchons plus, ne revenons pas au passé ; car ce serait lutter contre Dieu. Et comment, direz-vous, est-il possible de ne plus pécher ? Et d’abord comment tout ceci a-t-il été possible ? Si, coupables de tant de péchés, nous en avons été délivrés par le Christ, à bien plus forte raison pouvons-nous, avec son aide, persévérer dans l’état où nous sommes. Ce n’est pas la même chose d’obtenir une paix qu’on n’avait pas, ou de la garder quand on l’a reçue : car il est plus difficile d’acquérir que de conserver ; et cependant le plus difficile est devenu facile et s’est réalisé. Donc le plus facile nous viendra aisément, si nous nous attachons à celui qui a accompli pour nous le plus difficile. Mais ici Paul ne semble pas seulement indiquer que la chose est facile ; mais aussi qu’elle est raisonnable. Si en effet le Christ nous a réconciliés quand nous étions vaincus, il est juste de nous maintenir dans cet état de réconciliation et de lui témoigner par là notre reconnaissance, pour qu’il ne paraisse pas n’avoir réconcilié avec son père que des méchants et des ingrats. « Par lui », nous dit l’apôtre, « nous avons eu accès par la foi ». Si donc il nous a ramenés quand nous étions loin, à, bien plus forte raison nous retiendrait-il depuis que nous sommes près.
2. Considérez un peu, je vous prie, comme Paul met partout en opposition, et ce que Dieu fait de son côté, et ce que nous faisons du nôtre. Ce que Dieu a fait est varié, multiple, divers : car il est mort, il nous a délivrés, il nous a amenés, il nous a accordé une grâce ineffable ; et nous, nous n’avons apporté que 1a foi. Aussi l’apôtre dit-il : « Par la foi en cette grâce en laquelle nous sommes établis ». Quelle grâce, je vous demande ? Celle d’être jugés dignes de la connaissance de Dieu, d’être délivrés de l’erreur, de connaître la vérité, d’obtenir tous les biens par le baptême ; il nous a donné accès, afin de nous communiquer tous ces dons ; non pas seulement pour que nous soyons délivrés de nos péchés, mais aussi pour que nous jouissions de mille honneurs. Et il ne s’est pas borné à cela ; il nous a encore promis d’autres biens, des biens ineffables, qui surpassent notre intelligence et notre raison. C’est pourquoi Paul parle des uns et des autres. En effet, par ce mot : « Grâce », il désigne les biens présents que nous avons reçus, et par ceux-ci : « Nous nous