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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/272

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supportez avec courage, vous recevrez la même récompense que ceux qui ont tout donné aux pauvres. « Car », nous dit Paul ; « vous avez supporté avec joie l’enlèvement de vos biens, sachant que vous avez une richesse meilleure et permanente ». (Héb. 10,34)
Quelqu’un a mal parlé de vous et vous a déshonoré ? Que cela soit vrai, que cela soit faux, si vous supportez l’injure avec douceur, on vous a tressé une magnifique couronne. D’une part, le calomniateur nous procure une grande récompense. [« Réjouissez-vous », est-il écrit, « et tressaillez de joie, quand on a dit faussement toute sorte de mal de vous, parce que votre récompense est grande dans les cieux] » (Mt. 5,12) ; de l’autre, celui qui dit la vérité nous est aussi très-utile, pourvu, que nous la supportions avec patience. En effet, le pharisien était dans le vrai en parlant mal du publicain, et pourtant, du publicain il a fait un juste. Qu’est-il besoin d’entrer dans plus de détails ? On peut tout apprendre là-dessus, en étudiant attentivement l’histoire de Job. C’est ce qui fait dire à Paul : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » (Rom. 8,31.} Comme, avec du zèle, nous tirons parti de ceux mêmes qui nous affligent ; ainsi, par, notre lâcheté, nous ne profitons pas de ceux qui veulent nous être utiles. En quoi, je vous prie, a servi à Judas la compagnie du Christ ? En quoi la loi a-t-elle été utile aux Juifs ? À Adam, le paradis ? Moïse, à ceux qui étaient dans le désert ?
C’est pourquoi, laissant de côté tout le reste nous ne devons nous attacher qu’à une chose ; à bien régler notre vie ; et alors, le démon lui-même ne pourra bous vaincre ; il nous deviendra au contraire très-utile, en nous obligeant à veiller sur nous. C’était en dépeignant sa cruauté, que Paul réveillait les Éphésiens. Mais nous, nous dormons, nous ronflons, quoiqu’en présence d’un si méchant ennemi. Si nous savions qu’un serpent est caché près de notre lit, nous mettrions tout en œuvre pour le tuer ; le démon est caché dans nos âmes, et nous ne croyons pas nous en trouver mal, et nous succombons. La raison en est que nous ne le voyons pas des yeux du corps ; et pourtant ce devrait être un motif de plus pour veiller et nous tenir sur nos gardes il est facile en effet de se précautionner contre un ennemi visible ; mais nous échappons difficilement à l’ennemi invisible, à moins que nous ne soyons armés de toutes pièces, surtout parce qu’il n’attaque jamais directement, (autrement il serait bientôt pris), et qu’il ingère souvent son cruel poison sous le masque de l’amitié. Ainsi il détermina la femme de Job à donner son pernicieux conseil, sous l’apparence d’une vive affection ; ainsi, en s’adressant à Adam, il feint de vouloir lui être utile et de prendre à cœur ses intérêts : « Vos yeux s’ouvriront du jour où vous aurez mangé du fruit de cet arbre ». (Gen. 3,5) Ainsi, sous prétexte de piété, il persuada à Jephté d’immoler sa fille, d’offrir un sacrifice criminel. Voyez-vous ces pièges ? Voyez-vous des aises de guerre ? Tenez-vous donc en garde, revêtez-vous de pied en cap des armes spirituelles, étudiez soigneusement ses machines de guerre, afin qu’il ne puisse vous surprendre et que vous puissiez facilement le déjouer. C’est ainsi que Paul, savant dans cet art, a su le vaincre. Aussi disait-il : « Car nous n’ignorons pas ses desseins ». (2Cor. 2,11) Tâchons donc, nous aussi, de connaître et d’éviter ses embûches, afin qu’après en avoir triomphé, nous soyons proclamés vainqueurs dans ce monde et dans l’autre, et que nous obtenions les biens immortels par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec qui la gloire, l’empire, l’honneur, appartiennent au Père comme au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.