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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/297

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cause. Et quand vous l’entendez dire : « Qui me délivrera de ce corps de mort ? » ne vous imaginez pas qu’il accuse la chair. Car il ne dit pas : Ce corps de péché, mais : « Ce corps de mort », c’est-à-dire, ce corps mortel, sujet à la mort, mais qui n’a pas engendré la mort : ce qui est un indice, non de la malice de la chair, mais du dommage qu’elle a souffert. De même que si quelqu’un était pris par les barbares, on dirait de lui qu’il leur appartient, non parée qu’i[serait lui-même barbare ; mais parce qu’il serait en leur pouvoir ; ainsi le corps est dit corps de mort, non parce qu’il a causé la mort, mais parce qu’il est sous sa domination. C’est pourquoi Paul ne demande pas à être délivré du corps, mais du corps mortel : insinuant ce que j’ai répété bien des fois, que le corps est très-accessible au péché, précisément parce qu’il est passible.
4. Mais, direz-vous, puisque avant la grâce la tyrannie du péché était si grande, pourquoi les pécheurs étaient-ils punis ? Parce qu’on ne leur commandait que ce qu’ils pouvaient faire sous l’empire même du péché. En effet, Dieu n’exigeait pas d’eux une grande perfection ; il leur permettait l’usage des richesses, ne leur défendait pas d’avoir plusieurs femmes, tolérait la colère dans les limites de la justice, la jouissance des plaisirs modérés ; sa condescendance allait jusqu’au point que la loi écrite était moins exigeante que la loi naturelle. En effet, la loi naturelle voulait qu’un homme n’eût jamais qu’une femme, ce que le Christ rappelle quand il dit : « Celui qui les créa au commencement, les fit mâle et femelle ». (Mt. 19,4) Mais la loi de Moïse n’exigeait pas même qu’on renvoyât une première femme pour en prendre une seconde ; elle ne défendait point de les garder toutes les deux. Outre cela, nous voyons les anciens, instruits par la loi naturelle, faire encore, en d’autres points, beaucoup plus que ceux qui ont vécu sous la loi. On n’a donc pas eu de tort envers ceux-ci, puisque leur législation était si modérée. Donc s’ils n’ont pas pu vaincre, la faute en est à leur lâcheté. C’est pourquoi Paul rend grâces de ce que le Christ, laissant de côté toute enquête minutieuse, non seulement n’a pas demandé compte des péchés passés, mais nous a rendus capables de courir dans une voie plus parfaite. Ce qui lui fait dire : « Je rends grâces à Dieu par Jésus-Christ ». Sans parler du salut, bienfait dont tout le monde convient, il passe de la question qu’il vient de traiter à une autre plus élevée, à savoir : que non seulement nous sommes délivrés de nos péchés passés, mais que nous en sommes garantis pour l’avenir.
« Il n’y a donc pas maintenant de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ, qui ne marchent pas selon la chair ».(VIII, 1) Il n’a dit cela qu’après avoir rappelé le premier état de choses. En effet, après avoir d’abord dit ; « Ainsi j’obéis moi-même par l’esprit à la loi de Dieu, et par la chair à la loi du péché », il ajoute : « Il n’y a donc pas de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ ». Puis, comme on pouvait objecter que beaucoup pèchent même après le baptême, il se hâte d’aborder ce point. Et il ne dit pas simplement : « A ceux qui sont en. « Jésus-Christ » ; mais : « A ceux qui ne marchent pas selon la chair », indiquant par là que tout le mal qui se fait est l’effet de notre lâcheté ; car il est possible maintenant de ne pas marcher selon la chair, mais alors c’était difficile. Il donne encore une autre preuve dans ce qui suit, quand il dit : « Car la loi de l’esprit de vie qui est dans le Christ Jésus m’a délivré… (2) » : donnant ici à l’esprit le nom de loi de l’Esprit : Comme il a appelé le péché loi de péché, ainsi il appelle l’esprit loi de l’Esprit. Or, il a aussi donné ce nom à la loi de Moïse, en disant : « Nous savons en effet que la loi est spirituelle ». Où est donc la différence ? Elle est grande, elle est immense : l’une était spirituelle, et l’autre est la loi de l’Esprit. Et en quoi consiste cette différence ? C’est que la première a été simplement donnée par l’Esprit, et que la seconde donne abondamment l’Esprit à ceux qui la reçoivent. Aussi l’appelle-t-il loi de vie, par opposition non à la loi mosaïque, mais à la loi du péché. En effet quand il dit : « M’a délivré de la loi du péché et de la mort », il n’entend point parler de la loi de Moïse, vu que nulle part il ne l’a appelée loi de péché ; et comment pourrait-il lui donner ce nom, puisqu’il l’a déclarée juste, sainte, destructive du péché ? Celle qu’il désigne est donc celle qui combat la loi de l’Esprit. C’est la grâce de l’Esprit qui a mis fin à cette guerre terrible, en tuant le péché, en nous rendant le combat facile, en nous couronnant d’abord, et en nous provoquant à la lutte par des secours abondants.
Et ce qu’il fait toujours, eu passant du Fils