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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/296

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aide celui qui veut faire le bien. « Je me complais », dit-il, « dans la loi de Dieu, selon l’homme intérieur », c’est-à-dire : Je connaissais déjà le bien auparavant, mais je l’approuve quand je le trouve dans la loi écrite. « Mais je vois dans mes membres une autre loi, qui combat la loi de mon esprit (22, 23) ».
3. Sous le nom de loi qui combat, il désigne ici le péché, fion par honneur, mais à cause de la facilité avec laquelle on lui obéit. Car comme on donne à Mammon le nom de Seigneur, au ventre celui de Dieu, non qu’ils aient une dignité Propre, mais à raison de la soumission de leurs esclaves : ainsi l’apôtre appelle le péché loi, parce que ses partisans lui obéissent servilement et craignent de le quitter, comme ceux qui ont reçu la loi craignent de la perdre. Or le péché, dit Paul, est opposé à la loi naturelle ; car c’est là ce que signifient ces mots : « La loi de mon esprit ». Puis il parle d’armée et de combat, et reporte le poids de la lutte sur la loi naturelle. En effet, la loi de Moïse a été donnée par surcroît. Et pourtant toutes les deux, l’une en enseignant, l’autre en approuvant ce qu’il fallait faire, n’ont pas obtenu grand succès dans la bataille : tant est grande la violence du péché, à qui reste le triomphe et la victoire ! C’est ce que Paul déclare, et en constatant la défaite, il dit : « Mais je vois dans moi une autre loi qui combat la loi de mon esprit et me captive » ; il ne dit pas simplement : Qui remporte la victoire, mais : « Qui me captive « sous la loi du péché ». Il ne dit pas : Sous l’impulsion de la chair, ni : Sous la nature de la chair ; mais : « Sous la loi du péché », c’est-à-dire sous la tyrannie, sous la puissance.
Comment dit-il donc. « Laquelle est dans mes membres ? » Et qu’est-ce que cela ? Il n’en résulte pas que les membres soient péché, il les distingué au contraire du péché : car autre chose est le contenu, autre chose le contenant. De même donc que le commandement n’est pas mauvais, parce que le péché en a pris occasion ; ainsi en est-il de la nature de la chair, quoique le péché nous attaque par elle ; autrement l’âme aussi serait mauvaise, et à bien plus forte raison, puisque c’est à elle qu’appartient l’autorité pour agir. Mais cela n’est pas, cela n’est pas du tout. Si un tyran ou un voleur s’emparait d’une magnifique maison et d’un palais royal, ce n’est point à la maison qu’en reviendrait le blâme, mais l’accusation retomberait tout entière sur les auteurs d’une telle surprise. Mais les ennemis de la vérité, outre leur impiété, tombent ici dans une grande folie sans s’en apercevoir. En effet, ils n’accusent pas seulement la chair, mais ils calomnient la loi ; et pourtant si la chair est mauvaise, la loi est bonne, car elle est opposée à la chair et la combat ; et si la loi est mauvaise, la chair est bonne ; car, selon eux, elle lutte et combat contre la loi. Or, si ces deux choses sont opposées, comment les attribuent-ils toutes les deux au démon ? Voyez-vous comme la folie se mêle ici à l’impiété ? Elle n’est point la doctrine de l’Église : elle ne condamne que le péché ; mais elle affirme que les deux lois données par Dieu, la loi naturelle et la loi mosaïque, sont les ennemies du péché et non de la chair ; que la chair n’est point péché, mais œuvre de Dieu, apte à la pratique de la vertu, si nous veillons sur nous.
« Malheureux homme que je suis ! qui me a délivrera de ce corps de mort (21) ? » Voyez-vous jusqu’où va la tyrannie du péché, puisqu’il triomphe même de l’âme qui se complaît dans la loi ? Personne, nous dit Paul, ne peut affirmer que le péché me domine parce que je hais et repousse la loi, car je me complais en elle, j’y acquiesce ; j’y cherche mon refuge ; et pourtant elle ne peut sauver celui qui recourt à elle, tandis que le Christ a sauvé même celui qui s’éloignait de lui. Voyez-vous quelle est la supériorité de la grâce ? Ce n’est cependant pas ainsi que parlait l’apôtre mais gémissant et versant d’abondantes larmes, comme s’il était privé de tout secours, il nous fait voir, par son inquiétude même, la puissance du Christ, et s’écrie : « Malheureux homme que je suis ! qui me délivrera de ce corps de mort ? » La loi ne l’a pas pu, la conscience n’y a pas suffi ; et pourtant j’approuvais le bien, et non seulement je l’approuvais, mais, je luttais contre le mal. Car en disant : « Qui combat », il indique qu’il résistait lui-même. Où est donc l’espérance du salut ?
« Je rends grâces à Dieu », dit-il, « par Notre-Seigneur Jésus-Christ (25) ». Voyez-vous comme il fait voir que la présence de la grâce est nécessaire et que les bienfaits sont communs au Père et au Fils ? Si, en effet, il rend grâces au Père, c’est le Fils même qui en est la