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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/307

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soins qui conduisent au péché, mais je veux tout ce qui est nécessaire à l’entretien : et c’est ce qu’il exprime plus bas. En effet, après avoir dit qu’il ne faut point avoir souci de la chair, il ne s’en tient pas là, mais il ajoute : « Pour les passions », ce qui signifie encore ici Qu’on lui donne des soins, nous les lui devons : mais ne vivons pas selon la chair, c’est-à-dire, ne lui abandonnons pas l’empire sur notre vie. C’est à elle de suivre, et non de commander ; elle ne doit point régler notre vie, mais recevoir les lois de l’Esprit.
Après avoir fixé ce point, et prouvé que nous sommes redevables à l’Esprit, voulant montrer de quels bienfaits, il ne mentionne pas (et c’est ici surtout qu’il faut admirer sa prudence), il ne mentionnera, dis-je, les biens passés, mais les biens à venir. Pourtant les premiers en valaient bien la peine ; néanmoins il n’en dit rien, il ne rappelle point ces ineffables bienfaits, et ne parle que de l’avenir. C’est que d’ordinaire un bienfait passé fait moins d’impression sur la foule qu’un bien à venir et qu’un bien en expectative. Après avoir ainsi complété sa pensée, il lés attriste d’abord et les effraie, en leur rappelant les maux qu’engendre la vie selon la chair : « Car si c’est selon la chair que vous vivez, vous mourrez », faisant allusion à la mort éternelle, au châtiment et au supplice de l’enfer. Et même à y regarder de près, l’homme qui vit selon la chair est mort déjà dès cette vie, comme nous vous l’avons démontré dans le discours précédent. « Mais si, par l’esprit, vous mortifiez les œuvres de la chair, vous vivrez ». Voyez-vous qu’il ne parle pas de la nature du corps, mais des œuvres de la chair ? En effet, il ne dit pas : Si par l’esprit vous mortifiez la nature du corps, vous vivrez ; niais « Les œuvres » ; non pas même toutes les œuvres, mais les mauvaises, comme la suite le fait voir : Si vous faites cela, dit-il, vous vivrez. Et comment cela pourrait-il se faire, s’il s’agissait de tous les actes ? Car voir, entendre, marcher, sont des actions du corps, et si nous devions les mortifier, nous éteindrions en bous la vie jusqu’à nous rendre coupables d’homicide. Quelles sont donc les actions qu’il nous dit de mortifier ? Celles qui nous portent au mal, celles qui tendent au vice et qui ne peuvent se mortifier que par l’Esprit. Mortifier les autres ce serait vous suicider, ce qui n’est point permis ; mais celles-ci seulement doivent être mortifiées par l’Esprit : quand l’Esprit est là, tous les flots sont apaisés, les passions sont comprimées, plus rien ne se révolte en nous. Voyez-vous, ainsi que je le disais tout à l’heure, comme il nous excite par l’espoir des biens à venir, et montre que nous ne sommes pas seulement redevables pour les bienfaits passés ? La rémission des fautes passées, nous dit-il, n’est pas le seul bienfait de l’Esprit, mais il nous assure encore la possession des biens futurs et nous rend dignes de la vie éternelle. Il y ajoute encore une autre récompense, en disant : « Car tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. (4) ».
2. Cette nouvelle couronne est bien plus précieuse que la première. Aussi ne dit-il pas simplement : Ceux qui vivent par l’Esprit de Dieu, mais : « Ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu », indiquant ainsi que cet Esprit veut être le maître de notre vie, le pilote de la nacelle, le conducteur du char à deux chevaux. Car ce n’est pas seulement le corps, mais aussi l’âme que l’apôtre assujettit à ses rênes. Il ne veut point que l’âme agisse de sa propre autorité, mais il soumet ses facultés à la puissance de l’Esprit. Et de peur que, se fiant à la grâce du baptême, on ne se néglige dans sa conduite, il affirme que, si étant baptisé, vous ne vous laissez point conduire par l’Esprit, vous perdez la dignité dont vous étiez honoré et le privilège de l’adoption. Aussi ne dit-il point : Ceux qui ont reçu l’Esprit, mais : « Ceux qui sont conduits par l’Esprit ». C’est-à-dire, ceux qui sont ainsi gouvernés pendant toute leur vie, ceux-là sont fils de Dieu. Puis, comme cette dignité avait été accordée aux Juifs, (car il est écrit : « J’ai dit : Vous êtes des dieux et tous fils du Très-Haut. » (Ps. 71) ; et encore : « J’ai engendré des fils et je les ai élevés » (Ps. 2) ; et encore : « Israël mon premier-né » (Ex. 4,22) ; et dans Paul lui-même : « Auxquels appartient l’adoption » (Rom. 9,4) ; il démontre quelle grande différence, il y a entre ces deux honneurs. Si les noms sont les mêmes, nous dit-il, il n’en est pas ainsi des choses. Et il en donne la démonstration, en établissant une comparaison entre les justes, entre les dons eux-mêmes, et en parlant de l’avenir ; et d’abord il rappelle ce qu’on leur avait donné. Qu’était-ce donc ? L’esprit de servitude ; c’est pourquoi il ajoute : « Aussi vous n’avez point reçu de nouveau