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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/402

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de chimère, il n’en sera pas de même quand l’expérience sera là pour vous persuader. Eh ! ne voyez-vous pas, même sur cette terre, ce que Dieu a fait ? Comment il n’a pas admis les deux larrons au même partage ; ne voyez-vous pas qu’il a introduit l’un dans son royaume, qu’il a rejeté l’autre dans l’enfer ? Et que parlé-je du larron et du meurtrier ? Il n’a pas épargné son apôtre devenu traître ; il voyait bien qu’il allait se pendre, qu’il allait s’étrangler, il le voyait crevé par le milieu du corps [car : « Il a crevé par le milieu du ventre, et toutes ses entrailles se sont répandues] » (Act. 1,48) ; le Christ voyait toute cette tragédie d’avance, et il a laissé le misérable à son sort, afin de vous apprendre par un spectacle présent à croire à toutes les vérités de l’avenir.
Gardez-vous donc de vous tromper vous-mêmes en obéissant au démon ; car ce sont ses inspirations que vous écoutez. Si des juges, des maîtres, des précepteurs, quoique barbares, honorent les bons et punissent les méchants, comment serait-il conforme à la nature de Dieu de faire le contraire, et de décerner le même traitement au bon et à celui qui ne l’est pas ? Et d’où viendra la délivrance qui nous affranchira de la perversité ? Aujourd’hui, dans l’attente des supplices, au milieu de tant de terreurs inspirées par les juges, par les lois, les méchants ne renoncent pas encore au crime ; quand ils en seront venus à n’avoir plus de crainte, non seulement parce qu’ils croiront ne pouvoir pas tomber dans l’enfer, mais encore parce qu’ils espéreront d’entrer dans le royaume des cieux, quel terme mettront-ils à leur perversité ? Est-ce de la bonté, je vous en prie, d’encourager le mal, d’établir un prix pour la corruption, d’admettre au même traitement le sage et le déréglé, le fidèle et l’impie, Paul et le démon ? Jusqu’à quand nous repaîtrons-nous de frivolités ? Je vous en conjure, guérissez-vous de ce délire, rentrez en vous-mêmes, persuadez-vous qu’il faut craindre, qu’il faut trembler, afin d’être affranchis de l’enfer, afin d’obtenir, après cette vie passée dans la sagesse, les biens de l’autre vie, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ à qui appartient, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, la puissance, l’honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Traduit par M. PORTELETTE.