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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/435

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la pénètre avec plus de profondeur, il y trouvera bien d’autres perles encore. Mais quelques personnes nous avant souvent demandé pourquoi l’apôtre adresse tant de salutations dans cette lettre, ce qu’il ne fait dans aucune autre, nous répondrons que c’est par la raison qu’il n’avait pas encore vu les Romains. Fort bien, dira-t-on, mais il n’avait pas encore vu les Colossiens, et cependant il ne leur écrit rien de pareil. C’est que les Romains avaient plus de célébrité que les autres peuples, c’est que, des autres villes, on se transportait à Rome, comme dans une ville plus sûre et qui était une résidence impériale. Donc les fidèles étant dans une ville étrangère, comme il était important qu’ils y trouvassent toute espèce de sûreté, comme quelques-uns d’entre eux étaient personnellement connus de Paul, que certains d’entre eux avaient rendu en son nom de nombreux et signalés services, il était naturel que l’apôtre les recommandât dans sa lettre. C’est qu’en effet la gloire de Paul était éclatante alors, et à ce point que ses lettres seules étaient des titres sérieux de recommandation : non seulement on avait pour lui de la vénération, mais on le craignait. Autrement, il n’aurait pas dit : « Car elle en a assisté elle-même plusieurs, et moi en particulier » ; ni : « J’aurais voulu moi-même être anathème ». (Rom. 9,3) Il écrivait à Philémon : « Quoique je sois Paul, vieux, et de plus, maintenant prisonnier pour Jésus-Christ » (Phm. 1,9) ; et aux Galates : « Je vous dis, moi, Paul » ; et : « Vous m’avez reçu comme Jésus-Christ ». (Gal. 5,2 ; 9, 14) II écrivait aux Corinthiens : « Il y en a, parmi vous, qui s’enflent de présomption, comme si je ne devais plus vous aller voir » ; et encore : « J’ai proposé ces choses sous mon nom, et sous celui d’Apollon, afin de vous « apprendre à ne pas avoir de vous d’autres sentiments que ceux que je viens de marquer ». (1Cor. 4,18 et 6)
Il ressort de toutes ces paroles, que sa gloire éclatait partout. Donc voulant procurer aux fidèles et sûreté et considération, il les salue individuellement avec les éloges convenables. L’un, il l’appelle, mon cher ; l’autre, mon parent ; un autre est à la fois son ami et son parent ; un autre est le compagnon de ses liens ; un autre, il le traite de fidèle éprouvé dans le Seigneur ; un autre, d’élu du Seigneur. Il y a une femme qu’il a nommée en marquant sa dignité ; car ce n’est pas au hasard qu’il dit de Phébé : « La diaconesse » ; si l’expression eût été indifférente, il l’eût appliquée à Triphène et à Perside ; mais il dit, de l’une, qu’elle a le titre de diaconesse ; d’une autre, qu’elle travaille avec lui, et qu’elle l’assiste ; celle-ci, il l’appelle sa mère ; celle-là, il la glorifie, Four les fatigues qu’elle a supportées ; pour les hommes, ou il cite la famille à laquelle ils appartiennent, ou il leur donne le nom de frères, le nom de saints, ou il se borne à dire leur nom propre ; il en est qu’il appelle prémices, il en est qu’il honore, parce qu’ils ont embrassé la foi les premiers ; les plus distingués sont Priscilla et Aquilas. C’est que, si tous ces saints personnages étaient des fidèles, ils ne l’étaient pas tous également, ils n’avaient pas des titres égaux aux récompenses. Voilà, pourquoi l’apôtre, jaloux de les animer tous d’un zèle toujours plus ardent, ne cache aucun des titres qui donnent des droits à un juste éloge. Si les plus méritants ne devaient pas être plus récompensés, on verrait le relâchement chez le grand nombre.
4. Voilà pourquoi il n’y aura pas égalité d’honneur dans le royaume de Dieu ; voilà pourquoi il n’y a pas égalité entre tous les disciples ; trois, parmi eux, avaient la prééminence sur tous les autres, et, entre ces trois, il y avait encore une grande inégalité. C’est que Dieu apprécie tout avec l’exactitude la plus rigoureuse, jusque dans les rangs les plus reculés. « L’étoile », dit l’apôtre, « diffère de l’étoile, en éclat ». (1Cor. 15,41) Sans doute, les apôtres t’étaient tous, et tous devaient siéger sur douze trônes, et tous avaient quitté ce qui leur appartenait, et tous s’étaient attachés à Jésus-Christ ; cependant le Christ en choisit trois parmi eux. Et ce n’est pas tout ; parmi ceux-là, il en est dont il constata l’excellence qui les distinguait, qui les rendait supérieurs ; car il dit : « Pour ce qui est d’être assis à ma droite ou à ma gauche, ce n’est point à moi à vous le donner, mais ce sera pour ceux à qui il a été préparé » (Mc. 10,40) ; et il met Pierre au-dessus d’eux, par ces paroles : « M’aimez-vous plus que ne font ceux-ci ? » (Jn. 21,15) Et Jean était chéri par-dessus tous. Il sera tenu de toutes choses un compte exact, et si faible que soit votre supériorité sur votre prochain, si mince, si insignifiante qu’elle vous semble, elle n’échappera pas au jugement de Dieu. L’histoire