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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/455

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cieux et l’état des choses de là-haut. Maintenant, gage de quoi ? De la rédemption, de l’acquisition : car c’est alors qu’il y a rédemption parfaite. Maintenant, nous errons au milieu du monde, les accidents humains fondent sur nous en foule, nous sommes avec des impies mais la rédemption parfaite, celle qui n’admet ni péchés, ni troubles humains, c’est alors que nous la trouverons. Maintenant nous tenons un gage : car, maintenant même, nous avons renoncé à ces choses ; notre vie n’est pas sur la terre ; maintenant même nous sommes en dehors des choses d’ici-bas ; maintenant même nous ne sommes ici que des étrangers. « À la louange de sa gloire ». Il répète souvent cela. Pourquoi ? Parce que cela suffit pour inspirer la foi aux auditeurs. S’il faisait cela à cause de nous, il y aurait doute ; mais s’il l’a fait pour lui-même et pour manifester sa bonté, c’est un motif dont Paul se sert comme d’un témoignage, pour prouver qu’il n’aurait pu advenir autrement. De même, quand il est question des Israélites, les expressions suivantes reviennent souvent « Faites-nous à cause de votre nom ». Dieu lui-même dit : « Je fais à cause de moi ». Et Moïse : « Faites-moi à cause de votre nom », sinon pour un autre motif. Cela convainc les auditeurs, et les met en repos, en leur enseignant que Dieu ne peut manquer, à raison de sa propre bonté, de tenir ses promesses. Mais que ces paroles ne nous inspirent point le relâchement. Quand bien-même il agit pour lui, cela n’empêche pas qu’il n’exige de nous l’accomplissement de notre devoir. « Je glorifierai », dit-il, « ceux qui me glorifient, et ceux qui me comptent pour rien seront comptés pour rien » : Apprenons par là qu’il exige de nous que nous fassions notre devoir. La louange de sa gloire, c’est de sauver ses ennemis, mais ceux-là qui, une fois réconciliés, restent ses amis : car s’ils reviennent à leur première hostilité, tout est perdu, il n’y a rien de fait.

3. En effet, il n’y a pas de second baptême, pas de seconde réconciliation ; il ne reste plus que la redoutable attente du jugement, que l’avidité du feu qui doit dévorer les ennemis. Si nous devions, tout en restant perpétuellement les ennemis de Dieu, obtenir son indulgence, nous ne cesserions pas de lui faire la guerre, de nous abandonner aux voluptés, de nous corrompre, de nous rendre incapable de voir le soleil de justice qui a lui. Voulez-vous recevoir le rayon qui dessillera vos yeux ? Rendez-les beaux, sains, perçants. Dieu vous a fait voir le soleil de vérité. Si vous vous en détournez pour courir vous replonger dans les ténèbres, quelle sera votre excuse, votre justification ? Vous n’en aurez point : car vous aurez fait preuve d’une haine indicible. Quand vous ne connaissiez pas Dieu, vous étiez jusqu’à un certain point excusable de le haïr ; mais lorsque vous avez goûté à sa bonté, à son miel, si vous laissiez tout cela pour retourner à votre vomissement, vous donneriez les signes les plus manifestes de mépris et de dédain. Non, dira-t-on, je ne ferais que céder à la contrainte de la nature : j’aime le Christ, mais la nature me fait violence. S’il y a violence et contrainte, vous aurez une excuse ; si la faute provient de négligence, vous n’en aurez pas.

Examinons donc ce point, si les péchés sont causés par une contrainte, une violence, ou par un excès de négligence et de relâchement. « Tu ne tueras point », est-il écrit. Où est ici la contrainte, la violence ? La violence, c’est de tuer. Qui de nous, en effet, voudrait plonger le glaive dans la gorge du prochain, et ensanglanter sa droite ? Personne. Voyez-vous que c’est tout au contraire dans le péché que résident la contrainte et la violence ? Dieu a mis la tendresse dans notre nature, de façon que nous nous aimions les uns les autres. Il est écrit : « Tout animal aime son semblable, et tout homme son prochain ». Voyez-vous que nous devons à la nature les germes de la vertu ? C’est le vice qui est contre nature que s’il l’emporte en nous, c’est un signe d’extrême paresse de notre part. Prenons l’adultère : quelle est la contrainte qui y pousse ? La tyrannie du désir, répondra-t-on. Comment cela, dites-moi ? Est-ce qu’il n’est pas possible d’user de sa femme et de vaincre cette tyrannie ? Mais je suis épris d’amour pour la femme du prochain. — Ce n’est plus là de la contrainte : l’amour n’est pas du domaine de la contrainte. Ce n’est point par nécessité qu’on aime, mais par choix et par volonté. L’union des sexes, c’est peut-être une nécessité ; mais aimer celle-ci ou celle-là ce n’en est pas une. Ce n’est plus instinct sexuel, mais vanité, dérèglement, débauche. Où est la raison, dites-moi ? À posséder la femme qu’on a épousée, qu’on a prise pour en avoir des enfants, ou celle