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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/484

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HOMÉLIE VIII.

JE VOUS CONJURE DONC, MOI CHARGÉ DE LIENS POUR LE SEIGNEUR, DE MARCHER D’UNE MANIÈRE DIGNE DE LA VOCATION À LAQUELLE VOUS AVEZ ÉTÉ APPELÉS AVEC TOUTE HUMILITÉ ET TOUTE MANSUÉTUDE. (IV, 1)

Analyse.

  • 1-5. Éloge des chaînes. — Captivité de saint Paul.
  • 6-9. Exemples analogues empruntés à l’histoire de saint Pierre, à celle des trois jeunes gens de Babylone.

1. C’est une vertu chez les docteurs de ne rechercher ni les hommages ni les éloges de leurs subordonnés, mais uniquement le salut de ceux-ci, et de tout faire dans ce but : celui qui agirait autrement ne serait pas un docteur, mais un tyran. Car si Dieu vous a préposé à eux, ce n’est pas pour que vous obteniez plus de respect ; mais pour que, négligeant ce qui vous concerne, vous ne songiez qu’à les édifier. Tel est l’office d’un docteur : et tel se montrait le bienheureux Paul, qui, exempt de tout orgueil, se considérait comme un homme vulgaire, pour ne pas dire comme le dernier des hommes. Voilà pourquoi il s’appelle leur serviteur, et parle ordinairement en suppliant. Ici même, voyez comment son langage, loin d’être impérieux ou despotique, est humble et modeste : « Je vous conjure donc, moi chargé de liens pour le Seigneur, de marcher d’une manière digne de la vocation à laquelle vous avez été appelés ». Pourquoi cette exhortation, dis-moi ? Est-ce que tu désires quelque chose pour toi-même ? Nullement, répond-il, je ne veux que sauver autrui. Cependant, quand on conjure, c’est généralement dans son propre intérêt. — C’est justement que cela m’intéresse, répondra Paul voyez ce qu’il écrit ailleurs : « Maintenant nous vivons, si vous restez fermes dans le Seigneur ». Il ne cessait de souhaiter ardemment le salut de ses disciples. « Moi, chargé de liens pour le Seigneur ». Haute et sublime dignité, qui éclipse la royauté, le consulat et tous les autres honneurs.

De même il écrit à Philémon : Comme moi, le vieux Paul, qui de plus suis maintenant prisonnier de Jésus-Christ (9)… C’est que rien n’est beau comme les chaînes portées pour Jésus-Christ, les chaînes qui ont étreint des mains si saintes. Être enchaîné pour Jésus-Christ, c’est plus glorieux que d’être apôtre, que d’être docteur, que d’être évangéliste. Qui aime Jésus-Christ, me comprend. Oui, il sait le prix des chaînes, celui qui brûle, qui est fou de l’amour du Seigneur, et il aimerait mieux être enchaîné pour Jésus-Christ que d’habiter les cieux. Plus resplendissantes que l’or, plus qu’aucun diadème ; étaient les mains de Paul : ce bandeau couvert de pierreries qui ceint la tête des rois, ne leur donne pas tant de majesté que cette chaîne de fer subie pour Jésus-Christ. La prison de l’apôtre l’emportait en magnificence sur la demeure impériale ; que dis-je ? sur le ciel lui-même : car elle possédait en ce moment le prisonnier de Jésus-Christ. Et, si vous aimez Jésus-Christ, vous comprenez cette dignité, vous comprenez cette vertu, cette grâce accordée à la nature humaine de porter des chaînes pour Jésus-Christ. C’est peut-être plus glorieux que d’être assis à sa droite, plus auguste que d’occuper un des douze trônes qui entourent le sien. Et que dirai-je des choses humaines ? Je rougirais de comparer à l’éclat de ces chaînes les