Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/551

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

subsiste dans sa vivacité, comme attaché à la beauté de l’âme, et non à celle du corps.

3. Qu’y a-t-il de comparable au ciel, dites-moi, de comparable aux astres ? Quelque corps que vous me citiez, il a moins de blancheur : vous ne me montrerez pas d’yeux qui aient un pareil éclat. Quand ces objets parurent, les anges furent saisis d’admiration ; cette admiration, nous l’éprouvons aussi maintenant, mais non pas comme à l’origine. Tel est l’effet de l’habitude : elle émousse l’admiration : à plus forte raison, quand il s’agit d’une femme. De plus, survient-il une maladie, voilà tout le charme envolé. Cherchons dans une femme la bonté, la modération, la douceur : tels sont les signes de la vraie beauté ; quant aux attraits du corps, ne nous en inquiétons pas, et ne cherchons pas querelle à notre femme à propos de choses qui ne dépendent point d’elle : lui chercher querelle, ce, serait de l’impudence ; mais de plus n’éprouvons ni peine ni chagrin à ce propos. Combien d’hommes unis à de belles femmes ont péri misérablement ! Combien, dans d’autres conditions, ont poussé jusqu’à l’extrême vieillesse une vie constamment heureuse ! Nettoyons les taches de l’âme, effaçons les rides intérieures, guérissons les imperfections morales. C’est ce genre de beauté que Dieu recherche : rendons notre femme belle au gré de Dieu, et non pas au nôtre… Soyons indifférents à la fortune, à la noblesse mondaine, ne nous soucions que de la noblesse de l’âme : Que nul ne compte sur sa femme pour l’enrichir : ce sont là des richesses honteuses et mal acquises ; ne songez point à la fortune en vous mariant. Il est écrit : « Ceux qui veulent s’enrichir tombent dans la tentation, dans les convoitises insensées et funestes, dans les pièges, la perte et la ruine ». (1Ti. 6,9) Ne demandez donc point une grande fortune, et vous trouverez tout le reste facilement. Qui est-ce, dites-moi, qui laissera l’essentiel pour s’occuper de choses d’un moindre intérêt ? Hélas ! combien de fois cela nous arrive ! Avons-nous un fils ? nous ne nous occupons pas d’en faire un honnête homme ; mais de lui procurer un riche mariage : nous ne tenons pas à le bien élever, mais à le bien pourvoir ; si nous faisons un métier, nous ne songeons point à le faire honnêtement, mais à le rendre lucratif ; l’argent est tout : et si la corruption est partout, la faute en est à cette passion qui nous possède. « Les maris doivent aimer leurs femmes comme leur propre corps (28) ». Qu’est-ce à dire ? Paul recourt ici à une image plus forte, à un exemple plus frappant : et non seulement plus frappant, mais encore plus rapproché de nous, plus sensible, et équivalent à une nouvelle preuve. Le premier argument était moins pressant, on pouvait y répondre : c’est le Christ, c’est un Dieu qui s’est livré lui-même. Paul recourt alors à une autre méthode, en disant : « Ils doivent ainsi », Ce n’est plus une grâce, c’est une dette. Après avoir dit : « Leurs corps », il ajoute : « Car personne n’a jamais haï sa chair ; mais il la nourrit et la soigne (29) » : en d’autres termes, s’en occupe avec une grande sollicitude. Et comment est-ce sa chair ? Écoutez plutôt : « C’est maintenant l’os de mes os, et la chair de ma chair ». (Gen. 2,23) Et bien plus « Ils seront dans une seule chair ». (Eph. 5,31) « Comme le Christ a aimé l’Église ». Il revient à son premier exemple. « Parce que nous sommes les membres de son corps, formés de sa chair et de ses os (30) ». Comment cela ? C’est qu’il participe de la même matière que nous, comme la chair d’Eve, de la chair d’Adam. C’est à bon droit qu’il nomme les os et la chair : car c’est ce qu’il y a d’essentiel en nous : les os sont comme le fondement, et la chair comme le reste de l’édifice.

Pour Adam et Eve la chose est claire, mais elle ne l’est pas autant pour le Christ et l’Église. – Paul veut dire que l’union doit être la même ici. Qu’est-ce à dire : « De sa chair ? » C’est-à-dire, légitimement issus de lui : Et comment sommes-nous ainsi membres du Christ ? Parce que nous avons été faits selon lui. Et pourquoi « De sa chair ? » Vous le savez, vous qui participez à nos mystères : car voilà ce qui nous régénère. Et comment ? Écoutez encore notre saint : « Parce que les enfants ont part à la chair et au sang, semblablement il a participé, lui aussi, des mêmes choses ». Mais ici c’est lui qui s’est associé à nous, ce n’est pas nous qui nous associons à lui : comment donc pouvons-nous être de sa chair et de son sang ? Quelques-uns parlent du sang et de l’eau : mais non : ce qu’il veut montrer, c’est que, comme le Christ a été engendré sans commerce par l’opération du Saint-Esprit, ainsi nous sommes, nous, engendrés dans le baptême. Voyez que d’exemples,