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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/552

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pour nous convaincre de cette génération. O démence des hérétiques ! Ils tombent d’accord de la véritable génération, par l’eau, d’une chose déjà engendrée : et ils n’admettent pas que nous soyons le corps du Christ. Mais, si nous ne le sommes pas, comment accorder avec le reste ces paroles : « De sa chair et de ses os ? » Réfléchissez : Adam a été formé, le Christ a été enfanté : du flanc d’Adam est sorti le trépas ; du flanc du Christ est issue la vie dans le paradis a germé la mort ; sur la croix a été consommée la destruction de la mort.

4. Ainsi, de même que le Fils de Dieu participe de notre nature, nous participons, nous, de sa substance : et de même qu’il nous a en lui, nous l’avons en nous. « A cause de cela, l’homme laissera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme ; et ils seront deux dans une seule chair (31) ». Troisième argument : il montre que l’on quitte ses parents, les auteurs de ses jours, pour s’attacher à sa femme : et dès lors le père, la mère et l’enfant forment une chair unique résultant de l’union conjugale : car c’est la combinaison des semences qui produit l’enfant : de sorte que tous trois ne forment qu’une chair. De même, nous devenons une seule chair avec le Christ par la participation : et cela, encore bien plus effectivement que l’enfant. Pourquoi ? Parce qu’il en a été ainsi dès l’origine. Ne venez pas me dire que votre femme est comme ceci ou comme cela. Ne voyons-nous pas que dans la chair aussi nous sommes sujets à beaucoup d’imperfections ? L’un est boiteux, l’autre pied bot, un autre perclus des mains, un autre faible dans quelque autre membre : néanmoins, il ne se plaint pas de ce membre imparfait, il ne le retranche pas : souvent même il le préfère à tout autre : rien de plus naturel, il est le sien. – Paul veut donc que nous ayons pour notre femme autant d’affection que chacun en a pour soi-même : non comme participant de la même nature ; notre rapport légitime avec notre femme est plus étroit : il consiste en ce que nous ne formons plus deux corps, mais un seul, dont l’un forme la tête, l’autre le corps. – Et comment dit-il ailleurs que « Dieu est la tête du Christ ? » – Oui, de même que nous formons un seul corps, de même le Christ et le Père ne font qu’un. Il en résulte que le Père aussi est notre tête. Paul allègue deux exemples, celui du corps et celui du Christ : de là ce qu’il ajoute : « Ce mystère est grand : je le dis dans le Christ et dans l’Église (32) ». Qu’entend-il par là ? Il appelle ce mystère grand parce que le bienheureux Moïse, ou plutôt Dieu avait fait allusion à quelque chose de grand et de merveilleux. Il ajoute : « Je le dis dans le Christ », parce que le Christ aussi a quitté son Père pour descendre, pour venir vers l’épouse, et former un seul esprit : « Car celui qui s’unit au Seigneur est un seul esprit avec lui ». (1Co. 6,17) C’est fort à propos qu’il dit : « Ce mystère est grand » ; cela revient à dire : D’ailleurs l’allégorie ne détruit pas le précepte d’amour.

« Que chacun de vous donc aime sa femme comme lui-même ; mais que la femme craigne son mari (33) ». Oui, c’est un mystère, un grand mystère, qu’on oublie son père, l’auteur de ses jours, celui par qui on a été élevé, celle par qui on a été enfanté dans la souffrance, ceux a qui l’on doit tant, et à qui l’on est attaché par un commerce journalier, pour s’unir à une femme que l’on n’a jamais vue, avec laquelle on n’a rien de commun, et de la préférer à tout. Oui, c’est bien un mystère. Et cela ne cause aucune peine aux parents c’est le contraire qui leur en cause : il faut qu’ils se mettent en frais, en dépense, et néanmoins ils se réjouissent. Oui, c’est un grand mystère, qui enveloppe une sagesse ineffable. Dès longtemps Moïse l’avait prophétisé : et voici que Paul, à son tour, s’écrie : « Dans le Christ et dans l’Église ». D’ailleurs, cela n’est pas dit seulement en vue du Christ, mais encore en vue de la femme, afin que le mari en ait soin comme de sa propre chair, comme le Christ a soin de l’Église. « Mais que la femme craigne son mari ». Ce n’est pas seulement la tendresse qu’il recommande : il veut encore « Que la femme craigne son mari ». La femme est une puissance subordonnée. Qu’elle ne réclame donc point l’égalité : elle est au-dessous du chef. Et que d’autre part le mari ne méprise point en elle sa sujette : elle est le corps ; et si le chef vient à mépriser le corps, il se perd lui-même. Qu’il fasse donc de la tendresse un contre-poids à l’obéissance. Que tous deux soient, en effet, comme le chef et le corps ; celui-ci prêtant à l’autre, pour son service, les mains, les pieds, tous les autres membres : celui-là veillant sur le précédent, et concentrant en soi tout le sentiment. Rien de supérieur à une pareille union. Mais comment, dira-t-on, y aurait-il affection, s’il y a