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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/583

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su leur inspirer d’après ce que nous raconte Jean : comme ils le voyaient s’entretenir avec la samaritaine, ils lui rappelèrent bien qu’il était temps de prendre de la nourriture, mais aucun d’eux n’osa lui dire : « Qu’avez-vous à causer », ou bien : « Que cherchez-vous dans sa compagnie ? » (Jn. 4,27) Paul le savait, et comme il suivait pas à pas les traces du Maître, il variait son langage suivant les besoins de ses disciples, tantôt brûlant et tranchant dans le vif, tantôt employant des remèdes plus doux. Aux Corinthiens, il disait : « Que voulez-vous ? que je vienne à vous avec la verge, ou avec l’amour et avec l’esprit de douceur ? » (1Cor. 4,21) Aux Galates : « O Galates insensés ! » (Gala III, 1) Et ce reproche, il le leur adresse, non pas une, mais deux fois. Vers la fin de l’épître, il revient à la charge : « Qu’on ne me cause plus de nouvelles peines ». (Gal. 6,6) Puis il leur parle avec douceur, comme lorsqu’il dit : « Mes petits enfants, vous que j’enfante de « nouveau » (Gal. 4,19) ; et bien d’autres fois encore, il tient un pareil langage. Que cette épître respire la colère, tout le prouve et l’on s’en aperçoit à la première lecture.
Il faut dire pourquoi il était irrité contre ses disciples. Ce n’était pas pour peu de choses ni pour un mince motif, autrement il ne se serait pas laissé aller à un tel emportement. S’irriter pour des riens ; est le fait d’un homme à esprit étroit, d’un homme dur et tracassier, de même que c’est le fait d’un homme indolent et apathique, de se laisser abattre à la vue de graves désordres. Il n’en était pas ainsi de Paul. Quelle était donc la faute qui excitait son indignation ? Une grande, et bien grande faute, qui les rendait tous étrangers au Christ, comme il leur dit dans la suite de sa lettre : « Voici que moi, Paul, je vous dis que si vous vous faites circoncire, le Christ ne vous servira de rien » ; puis il dit encore : « Vous tous, qui cherchez votre justification dans la loi, vous êtes exclus de la grâce ». (Gal. 5,2-4) Que veut-il dire par là ?. Car il faut éclaircir et développer ses paroles. Ceux des Juifs qui avaient la foi, mais qui étaient en même temps attachés au judaïsme, et à qui la vanité tournait la tête, voulurent se poser en docteurs et se rendirent chez les Galates pour leur enseigner qu’ils devaient se faire circoncire, observer le sabbat et les cérémonies du premier jour de chaque mois, qu’ils devaient enfin ne pas écouter Paul qui supprimait tout cela. Pierre, Jacques et Jean disaient-ils, n’empêchent point d’observer ces coutumes, et ce sont les premiers parmi les apôtres, ils ont été disciples du Christ. Il est vrai qu’ils ne s’opposaient point à cela ; mais s’ils toléraient ces pratiques, ce n’était point qu’ils en fissent un dogme, c’était pour condescendre à la faiblesse des Juifs convertis.
Quant à Paul, qui prêchait les gentils ; il n’avait pas besoin de montrer la même condescendance, quand il se trouva en Judée, il fut aussi tolérant que les autres. Mais ces trompeurs se gardaient bien de dire les motifs de cette condescendance de Paul et des autres apôtres, et ils trompaient les simples en disant qu’ils ne devaient pas écouter Paul, car lui ne datait que d’hier et d’aujourd’hui, les autres, Pierre et ses compagnons, étaient ses anciens ; lui, était le disciple des apôtres, eux, étaient les disciples du Christ ; lui était seul, eux étaient beaucoup, et ils étaient les colonnes de l’Église. Et cet homme, ajoutaient-ils, est un hypocrite, car il est reconnu que lui, qui supprime la circoncision, l’a maintient ailleurs. A vous, il prêche une chose, aux autres, une autre.
Quand donc Paul s’aperçut que le feu avait atteint tous les Galates, quand il vit qu’un violent incendie allait consumer l’Église de Galatie, que la maison qu’il avait fondée était ébranlée, et qu’elle était sur le point de s’écrouler, il fut en proie à un juste ressentiment, en proie aussi au désespoir, comme le prouvent ces paroles : « J’aurais voulu me trouver maintenant avec vous, et vous entretenir de vive voix » (Gal. 4,20) ; et il leur écrivit cette épître, où il répond à tous les chefs d’accusation accumulés contre lui. Tout d’abord il répond directement aux insinuations de ses adversaires qui, pour miner son influence, disaient que les autres apôtres étaient les disciples du Christ, et que lui était le disciple des apôtres. Et c’est, pour cela qu’il commence en ces ternies : « Paul, apôtre, non de la part des hommes, ni par des hommes ». Car ces trompeurs disaient, comme je vous l’ai déjà fait remarquer, qu’il était le dernier des apôtres, et qu’il avait été instruit par eux. Pierre, Jacques et Jean sont venus avant lui, disaient-ils, ce sont les premiers parmi les disciples, ils ont reçu les dogmes de Jésus-Christ, c’est à eux qu’il faut obéir, et non à lui, or ils ne sont