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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/585

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au Père parce que son nom vient après celui du Père, que diront-ils en voyant que dans ce passage l’apôtre commence par le Fils pour arriver au Père ? Mais ne prononçons point de blasphème. Il ne faut pas que notre ardeur à réfuter ces gens-là nous fasse sortir de la vérité. II faut au contraire, fussent-ils mille et mille fois plus fous, que nous nous enfermions scrupuleusement dans les limites de la piété. De même que nous ne dirons pas, nous, que le Fils est plus grand que le Père, parce que Paul a parlé en premier lieu du Fils (car ce serait le dernier degré de la folie, et le comble de l’impiété), de même il ne faut pas croire que dans cette formule du baptême, le Fils soit inférieur au Père.
« Qui l’a ressuscité d’entre les morts ». Que faites-vous, Paul ? Vous voulez ramener des judaïsants à la foi, et vous ne leur montrez rien de grand et d’imposant, comme lorsque vous disiez dans votre épître aux Philippiens que « Ayant la forme et la nature de Dieu, il n’a point cru que ce fût pour lui une usurpation d’être égal à Dieu » (Phil. 2,6), comme lorsque vous vous écriiez en écrivant aux Hébreux : « Il est la splendeur de sa gloire, et le caractère de sa substance » (Héb. 1,3), comme lorsque le fils du tonnerre disait tout d’abord à haute voix : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu » (Jn. 1,1), comme lorsque Jésus en personne disait devant les Juifs à plusieurs reprises qu’il pouvait les mêmes choses que son Père, et qu’il avait la même puissance. Vous ne dites rien de cela, vous laissez toutes ces choses de côté pour ne parler que de l’incarnation, de la croix et de la mort du Sauveur ? Oui, répond-il. S’il avait à parler devant des hommes qui n’ont pas idée de la grandeur du Christ, il ferait bien de traiter ces points-là ; mais puisqu’ils se séparent de nous parce qu’ils ont peur d’être punis s’ils s’écartent de la loi, il fait mention de ce fait, qui suffit à prouver la non-nécessité de la loi, je veux parler du bienfait que nous avons tous reçu de la croix et de la résurrection. Dire que au commencement était le Verbe ; et qu’il se trouvait dans la forme de Dieu, en faire l’égal de Dieu, et avancer d’autres choses semblables eût été bon pour démontrer la divinité du Verbe ; mais ce n’était pas ce dont alors il s’agissait. Mais en disant que « Le Père l’a ressuscité d’entre les morts ». Paul rappelle le bienfait capital que nous avons reçu du Christ : ce qui ne contribuait pas peu à lui faire atteindre le but qu’il se proposait. Car la plupart des hommes ont coutume de ne pas prêter autant d’attention au langage de ceux qui célèbrent la grandeur de Dieu, qu’au langage de ceux qui montrent les bienfaits que Dieu leur a accordés. Aussi a-t-il négligé tout cela pour ne parler que des bienfaits dont nous avons été l’objet.
3. Mais ici les hérétiques nous assaillent encore et disent : Voici que le Père ressuscite le Fils. Par l’effet de la maladie dont ils ont été une fois atteints, ils se refusent à entendre les plus sublimes de nos dogmes ; et quand ils rencontrent des expressions humbles et ordinaires, employées soit à cause de la chair, soit pour honorer Dieu, soit dans un autre but, ils les recueillent et les examinent séparément, et se font du tort à eux-mêmes, car je ne saurais Aire qu’ils en font à l’Écriture. Je voudrais bien leur demander pourquoi ils disent cela. Ont-ils l’intention de prouver que le Fils est faible, et qu’il n’a pas la force de ressusciter un seul corps ? Et cependant la foi en lui et même dans les ombres de ceux qui croyaient en lui a fait ressusciter des morts. (Act. 5,15) Quoi, ces hommes qui croyaient en lui, et qui étaient mortels, ont pu rendre des morts à la vie rien que par l’effet de l’ombre que projetaient leurs corps de boue, et par le contact des vêtements qui enveloppaient ces mêmes corps, et lui, n’a pas eu la force de se ressusciter lui-même ? Quelle évidente folie, quel excès de démence ! Ne l’as-tu pas entendu dire : « Détruisez ce temple et je le relèverai en trois jours » (Jn. 2,19) ? et une autre fois : « J’ai le pouvoir de déposer mon âme, et j’ai le pouvoir de la reprendre ? » (Jn. 10,18) Pourquoi donc est-il dit que son Père l’a ressuscité ? Pour attribuer au Père les œuvres du Fils, afin d’honorer le Père et de ménager la faiblesse des auditeurs.
« Et tous les frères qui sont avec moi ». Pourquoi n’en fait-il pas mention dans ses autres épîtres ? Ou bien il n’y met que son nom, ou bien il y joint celui de deux ou de trois de ses compagnons. Ici il fait figurer tout un groupe de fidèles, c’est pourquoi il n’en désigne aucun par son nom. Pourquoi donc fait-il cela ? On l’accusait d’être seul à prêcher ce qu’il prêchait, et d’introduire dés nouveautés dans le dogme. Voulant faire tomber ces soupçons, et