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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/594

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homme ordinaire, mais par un zèle divin, ce zèle portait à faux, mais ce n’en était pas moins du zèle. Et aujourd’hui que je cours pour l’Évangile et que je connais la vérité, je n’agirais comme je le fais que par vanité ? Si à l’époque de mes erreurs une telle passion n’avait pas de prise sur moi, si mon zèle pour Dieu m’entraînait seul à ces excès, combien plus, maintenant que je connais la vérité, ne mériterais-je pas d’être à l’abri de ce soupçon ? Dès que j’ai eu embrassé les dogmes de l’Église, je me suis immédiatement dépouillé de tout ce qui pouvait m’attacher au judaïsme, et j’ai montré dès lors encore plus de zèle qu’autrefois, ce qui est la preuve que ma conversion a été sincère et que j’étais plein de zèle pour Dieu. Si cela n’était pas, à quel autre motif, dites-moi, pourrait-on attribuer un tel changement, à quoi attribuer la résolution que j’ai prise alors de quitter les honneurs pour l’injure, l’impunité pour le danger, la sécurité pour la misère ? Non, je n’eus pas d’autre mobile que l’amour de la vérité.
« Mais lorsqu’il a plu à Dieu, qui m’a choisi particulièrement dès le ventre de ma mère, et qui m’a appelé par sa grâce, de révéler son fils en moi, afin que je le prêchasse parmi les nations, je l’ai fait aussitôt, sans prendre conseil de la chair et du sang (15, 16) ». Voyez pourquoi il s’attache à prouver que même au temps de son erreur la Providence exerçait sur lui son action mystérieuse. Si dès le ventre de sa mère il était réservé pour devenir un apôtre et pour être appelé à en remplir les fonctions, et s’il ne fut appelé qu’assez tard, obéissant aussitôt qu’il fut appelé, il est bien évident que Dieu avait quelque dessein secret pour avoir attendu jusque-là. Quel était donc ce dessein ? Sans doute il vous tarde d’apprendre de moi pourquoi Dieu ne l’appela pas au nombre de ses douze apôtres. Mais pour ne point m’écarter du sujet qui me presse, et ne point prolonger cet entretien, je vous en prie au nom de l’affection que vous me portez, ne cherchez pas à tout apprendre de moi, cherchez au contraire en vous-mêmes, et priez Dieu de vous révéler la vérité. Nous vous avons parlé à ce sujet, lorsque nous avons raconté son changement de nom, et pourquoi Dieu l’appela Paul au lieu de Saul. Si vous avez oublié mes paroles, lisez le livre où elles ont été recueillies, et vous saurez tout. En attendant, reprenons la suite du discours, et voyons comment il s’y prend encore pour montrer qu’il n’y avait rien d’ordinaire dans ce qui lui est arrivé, mais que c’était Dieu qui faisait tout, qui réglait tout avec une singulière prévoyance. « Et qui m’a appelé par sa grâce ». Dieu l’a appelé à cause de ses mérites, selon ce qu’il dit à Ananie : « Cet homme est un instrument que j’ai choisi pour porter mon nom devant les gentils et devant les rois ». (Act. 9,15) C’est-à-dire, il est capable de me servir et de faire de grandes choses. Telle est la raison que Dieu donne du choix qu’il a fait de lui ; mais lui-même, en toute circonstance, rapporte tout à la grâce et à l’ineffable bonté de Dieu, et il s’exprime en ces termes : « Mais j’ai reçu miséricorde, afin que je fusse le premier en qui Jésus-Christ fit éclater son extrême patience, et que j’en devinsse comme a un modèle et un exemple à ceux qui croiront en lui pour acquérir la vie éternelle ». (1Tim. 1,16)
Avez-vous remarqué son extrême humilité ? J’ai reçu miséricorde, dit-il, pour que nul ne désespère, en voyant que le plus méchant des hommes a été l’objet de la clémence divine. C’est ce qu’il veut nous faire entendre par ces mots : « Afin que Jésus-Christ fît éclater en moi son extrême patience, et que j’en devinsse comme un modèle et un exemple à ceux qui croiront en lui. Lorsqu’il lui a plu de me révéler son Fils ». Ailleurs le Christ dit : « Nul ne connaît le Fils, si ce n’est le Père, et nul ne connaît le Père, si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils voudra le révéler ». (Lc. 10,22) Vous voyez que le Père révèle le Fils, et que le Fils révèle le Père. Il en est de même pour leur glorification, le Fils glorifie le Père, et le Père glorifie le Fils : « Glorifiez-moi, dit-il, afin que je vous glorifie ». (Jn. 17,1, 4) II a dit une autre fois : c De même « que je vous ai glorifié ». Pourquoi Paul n’a-t-il pas dit : Révéler son Fils à moi, mais « En « moi ? » Il voulait montrer que ce ne sont pas seulement des paroles qui lui ont enseigné les choses de la foi, mais qu’il fut entièrement pénétré par l’Esprit, quand la lumière de la révélation se fit dans son âme ; il voulait montrer aussi que le Christ était en lui et s’entretenait avec lui. « Afin que je prêche son évangile parmi les gentils ». non seulement Dieu lui donna la foi, mais encore il le choisit. Dieu s’est révélé à moi non pas seulement pour que