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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/596

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avaient été faits apôtres avant moi ». Comme ses adversaires répétaient sur tous lestons que ceux-ci étaient ses anciens, qu’ils avaient été appelés avant lui ; je ne suis pas allé auprès d’eux, répond-il. S’il avait dû se mettre en communication avec eux, celui qui lui avait révélé sa doctrine lui en aurait aussi donné l’ordre.
Pourquoi donc n’alla-t-il pas à Jérusalem ? Et certes il y alla, et ce ne fut pas simplement pour y aller, mais ce fut aussi pour y apprendre quelque chose de la bouche des apôtres. – Quand fit-il ce voyage ? Il le fit à l’époque où l’Église d’Antioche, cette Église qui, dès les premiers jours montra tant de zèle, débattait la question dont nous nous occupons maintenant, la question de savoir s’il fallait astreindre les païens convertis à la pratique de la circoncision, ou s’il ne fallait les soumettre à aucune exigence de cette sorte. C’est alors que ce même Paul, accompagné de Silas, se rendit en personne à Jérusalem. Comment se fait-il donc qu’il dise : Je n’y suis point allé, et je n’ai pris conseil de personne ? c’est d’abord parce qu’il ne fit pas ce voyage de lui-même, mais par délégation : en second lieu, parce qu’il y allait non pour s’instruire ruais pour persuader. Pour lui, dès le commencement, il s’en tint à cette opinion, qui fut après cela sanctionnée par les apôtres, qu’il ne fallait pas exiger la circoncision. Comme en attendant on ne croyait pas devoir s’en rapporter à lui, et qu’on avait les yeux tournés vers ceux de Jérusalem, il se rendit dans cette ville, non pour y apprendre personnellement quelque chose de plus, mais pour convaincre ceux qui étaient d’un avis contraire au sien que les apôtres de Jérusalem étaient d’accord avec lui sur ce point. Dès l’abord il avait jeté une telle vue d’ensemble sur ce qu’il était nécessaire de décider, et il avait si peu besoin d’un maître qui l’instruisit, que ces décisions, prises plus tard par les apôtres après mainte délibération, il les prévit avant toute délibération et les garda en lui-même inébranlablement, grâce à la lumière qui lui était venue d’en haut. C’est aussi ce qu’indiquait saint Luc. quand il disait que Paul s’entretint longuement avec eux sur ce sujet, même avant d’aller à Jérusalem. (Act. 15,2) Comme les chrétiens ses frères croyaient avoir besoin de nouvelles instructions à ce sujet, Paul se rendit à Jérusalem pour eux, non pour lui. S’il dit : Je n’y suis pas allé, c’est pour dire et qu’il n’y est point allé avant d’entreprendre ses prédications, et que, lorsqu’il y est allé, il n’y est pas allé pour s’instruire. Telle est la double signification de ses paroles : « Aussitôt je ne pris conseil ni de la chair ni du sang ». Il ne se contente pas de dire : Je ne pris pas conseil, il ajoute « Aussitôt ». Si donc après cela il est allé à Jérusalem, ce n’a pas été pour ajouter à sa doctrine. « Mais je me transportai en Arabie ». Voyez quelle effervescence de zèle : il entreprend de cultiver les pays qui n’avaient pas encore été cultivés et qui étaient encore à l’état sauvage. S’il était resté avec les apôtres, comme il n’avait plus rien à apprendre, la prédication eût été entravée. Il fallait que partout ils transmissent la parole de Dieu. C’est pourquoi le bienheureux Paul, enflammé par, le Saint-Esprit, entreprit tout d’abord d’instruire les peuples étrangers et barbares, et embrassa une carrière pleine de fatigues et de dangers.
11. Contemplez son humilité : Après avoir dit : « Je me transportai en Arabie », il ajoute « Et je retournai à Damas ». Pas un mot de ses succès, ni du nombre, ni de la qualité de ceux qu’il catéchisa, et pourtant, au moment où il recevait le baptême, il montrait tant de zèle qu’il déconcerta les Juifs, et les remplit d’une si violente colère qu’ils s’unirent aux gentils pour lui tendre des embûches et pour essayer de le tuer : ce qui ne serait pas arrivé, s’il n’avait augmenté le nombre des croyants. Battus par les armés de la prédication, ils ne s’occupèrent plus que de le faire périr, et c’est là la meilleure preuve du triomphe de Paul. Mais le Christ ne permit pas qu’il fût tué, il le conservait pour qu’il prêchât son Évangile. Cependant Paul ne parle nullement de ces succès, De même tout ce qu’il dit, il le dit, non par amour-propre, non pour qu’on le croie supérieur aux apôtres, ni par ressentiment centre ceux qui cherchent à le rabaisser, mais parce qu’il craint que cela ne nuise à l’effet de ses prédications. En effet il se traite lui-même d’avorton, déclare qu’il est le premier parmi les pécheurs, le dernier parmi les apôtres, et qu’il est indigne de porter un si beau titre (1Cor. 15,8, 9 ; 1Tim. 1,15) ; et celui qui s’exprimait ainsi était celui qui avait enduré le plus de peines et de travaux. N’est-ce pas une preuve éclatante de son esprit d’humilité ? Un homme qui a conscience de son peu de