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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/282

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enfanterez. Ne regardez pas la terre, c’est du ciel que vient la vertu efficace, c’est la grâce de l’Esprit qui opère ; oubliez la nature et les lois du mariage. Toutefois, comme ces paroles dépassaient son esprit, il ajoute une autre démonstration. Considérez comme la stérilité lui sert à produire la foi nécessaire ici. Les paroles qu’il avait prononcées n’étant pas comprises de la Vierge, voyez comme il abaisse son discours pour la conduire à la foi qu’il réclame d’elle, comme il se sert de choses sensibles : Sachez, dit-il, qu’Élisabeth, votre cousine, a conçu aussi elle-même un fils dans sa vieillesse, et voici le sixième mois de la grossesse de celle qui est appelée stérile: (Luc. 1, 36) Comprenez-vous bien que cette stérilité n’a eu lieu qu’en vue de la Vierge ? Car pourquoi lui parle-t-il de la grossesse de sa cousine ? pourquoi dit-il dans sa vieillesse ? pourquoi ajoute-t-il de celle qui est appelée stérile. ? Il employait tous ces moyens pour obtenir la foi due à l’Annonciation. Voilà pourquoi il parle et de l’âge, et du défaut de la nature ; voilà pourquoi il a attendu qu’un certain temps se fût écoulé depuis le jour de la conception. En effet, il ne la lui a pas annoncée tout de suite, il a attendu six mois, de manière que la grossesse indiquât la conception, et que la démonstration de cette conception fût incontestable. Et maintenant, considérez encore la sagesse de Gabriel ; il ne lui parle pas de Sarra, ni de Rébecca, ni de Rachel, quoique ces femmes eussent été stériles et fort avancées dans la vieillesse, et que leur fécondité ait été un miracle ; mais c’étaient d’anciennes histoires. Or, les faits nouveaux ci de date récente qui arrivent de nos jours, ont beaucoup plus de force que les anciens pour nous persuader à croire au miracle. Voilà pourquoi, laissant de côté ces vieux exemples, Gabriel lui propose celui de sa cousine, pour l’amener à conclure de ce fait ce qui devait lui arriver à elle-même de l’enfantement de sa cousine, le mystère redoutable et vénérable de l’enfantement qui devait, elle aussi, la rendre mère. Cet enfantement d’Élisabeth tient le milieu entre l’enfantement ordinaire et l’enfantement qui produisit le Seigneur ; moins merveilleux que l’enfantement virginal, mais plus merveilleux que l’enfantement de nos mères. De sorte qu’Élisabeth était comme un pont qui lui servait à faire passer l’esprit de la Vierge de l’enfantement naturel à l’enfantement qui surpasse la nature.
9. J’aurais bien voulu ajouter encore d’autres réflexions, et vous donner d’autres raisons de la stérilité de Rébecca et de Rachel ; mais le temps me presse, et je me hâte de vous montrer la vertu de la prière ; car toutes nos digressions ont eu pour but de vous faire comprendre l’efficacité des prières d’Isaac pour faire cesser la stérilité de son épouse, et la longueur du temps qu’ont duré ces prières.Isaac, dit le texte, it priait pour Rébecca son épouse, et Dieu l’exauça. (Gen. 25,21) N’allez pas croire qu’il invoqua Dieu et qu’aussitôt il fut exaucé. Il employa beaucoup de temps à prier Dieu. Si vous voulez savoir combien de temps, je vous le dirai d’une manière précise : Vingt ans bien comptés, employés à prier Dieu. Qui le prouve ? La suite même des événements. Car l’Écriture, voulant nous montrer la foi, la patience et la sagesse de l’homme juste, a révélé jusqu’au temps, quoique un peu à mots couverts, pour réveiller nos esprits engourdis. Toutefois, elle n’a pas voulu que l’on pût s’y tromper. Écoutez donc, voyez de quelle manière elle nous a révélé le temps, à mots couverts. Or, Isaac avait quarante ans lorsqu’il épousa Rébecca, fille de Bathuel, le Syrien. (Gen. 25,20) Avez-vous entendu l’âge qu’il avait, quand il se maria ? Quarante ans, dit le texte, quand il épousa Rébecca. Maintenant que nous savons son âge, quand il se maria, apprenons aussi à quel âge il eut des enfants, combien d’années il avait quand il engendra Jacob ; ce qui nous montrera : combien de temps sa femme est demeurée stérile, et nous fera voir aussi, que ; pendant tout ce temps-là, il priait Dieu. Combien d’années donc avait-il quand il engendra Jacob ? \it. dit le texte, it sortit, tenant de sa main le pied de son frère. C’est pourquoi il l’appela Jacob, et l’autre Ésaü. Isaac avait soixante ans lorsque ces deux enfants lui naquirent. (Gen. 25,25-26) Donc, s’il avait quarante ans quand il épousa Rébecca, et soixante ans, quand ses fils lui naquirent, il est clair que son épouse est demeurée stérile pendant vingt ans, et que, pendant tout ce temps-là, Isaac priait Dieu.
10. Eh bien ! ne rougissons-nous pas, ne sommes-nous pas confondus, quand nous voyons ce juste, pendant vingt ans, attendre, sans perdre l’espoir, tandis que nous, trop souvent, après une ou deux demandes, nous nous décourageons, nous nous indignons ; et cependant cet homme juste était en grande faveur auprès de Dieu il se résignait à voir le don différé ; il attendait