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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/105

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enfants de Dieu, et ses enfants bien-aimés.
4. Considérons, mes frères, l’amour de Celui qui nous a appelés, l’état heureux auquel il nous appelle, et la gloire qu’il nous a donnée ; et menons une vie qui soit digne de ces grands dons. Crucifions-nous pour le monde, et crucifions le monde pour nous ; et employons tous nos soins à vivre ici-bas comme l’on vit dans les cieux. Ne croyons pas avoir quelque chose de commun avec la terre, parce que notre corps n’est pas encore élevé dans le ciel, car notre chef y règne déjà. Le Fils de Dieu est venu dans le monde avec les anges, et ayant pris la nature humaine, il l’a élevée dans les cieux lorsqu’il y est retourné, afin qu’avant que nous y montions aussi nous sussions qu’il ne nous est pas impossible de vivre dans la terre comme dans un ciel.
Tâchons de conserver la naissance illustre que nous avons reçue par notre baptême. Cherchons tous les jours ce royaume éternel, et considérons toutes les choses présentes comme des ombres et comme des songes. Si un roi de la terre vous avait trouvé pauvre et mendiant, et vous avait tout d’un coup adopté pour son fils, vous ne penseriez plus à votre misère passée, ni à la bassesse de votre cabane, quoique d’ailleurs il n’y ait pas une fort grande différence entre ces deux choses. Ne pensez donc plus à votre première condition, puisque l’état, auquel vous avez été appelé, est sans comparaison, plus illustre que la dignité royale. Car Celui qui nous a appelés est le Seigneur des anges ; et les biens qu’il vous donnera ne sont pas seulement au-dessus de toutes paroles, mais même au-delà de toutes pensées. Il ne vous fait point passer de la terre à la terre comme ce roi pourrait faire ; mais il vous élève de la terre au ciel, et d’une nature mortelle à une gloire immortelle et ineffable, qui ne sera bien connue de nous, que lorsque nous la posséderons.
Comment donc, vous qui devez être admis au partage de ces grands biens, vous souvenez-vous encore des richesses de la terre ? et comment vous amusez-vous encore a des fantômes et à des images vaines ? Ne croyez-vous pas que toutes les choses que nous voyons sont plus viles et plus basses que les haillons des pauvres et des mendiants ? Et comment donc serez-vous dignes de l’honneur auquel vous êtes appétés ? Quelle excuse vous restera-t-il, ou plutôt quelle punition ne souffrirez-vous point, si après avoir reçu une si grande grâce, « vous retournez à votre premier vomissement ? » (2Pi. 2,22) Vous ne serez pas punis simplement comme un homme qui pèche, mais comme un entant de Dieu qui lui est rebelle, et l’éminence de la dignité à laquelle vous étiez élevés, ne servira qu’à rendre plus grand votre supplice. Ce qui certes est bien raisonnable, puisque nous-mêmes nous châtions nos enfants plus sévèrement que nos serviteurs, lorsqu’ils n’ont commis que la même faute, principalement quand nous les avons comblés de bienfaits.
Que si Adam, que Dieu avait mis dans le paradis terrestre, a souffert tant de maux après l’honneur qu’il avait reçu, à cause seulement d’un péché qu’il commit, comment, nous qui avons reçu le ciel et qui avons été faits cohéritiers du Fils unique de Dieu, pourrons-nous espérer quelque pardon, si nous quittons la colombe pour suivre le serpent ? On ne nous dira pas comme à Adam : « Vous êtes terre, vous retournerez en terre, et vous cultiverez la terre (Gen. 3,19) ; » mais on nous prononcera une sentence bien plus effroyable ; puisqu’on nous condamnera aux ténèbres extérieures, aux chaînes éternelles, au ver qui ronge et envenime tout ensemble, et au grincement de dents. Et il est bien juste qu’après que tant de grâces et de faveurs n’ont pu vous rendre meilleurs, vous enduriez ces derniers et ces horribles supplices..
Élie autrefois a ouvert et fermé le ciel, mais ce n’était que pour faire descendre ou pour arrêter la pluie. Dieu vous ouvre maintenant les cieux, mais c’est pour vous y faire monter ; et non seulement afin que vous y montiez, mais, ce qui est encore plus, afin que, si vous le voulez, vous y fassiez aussi monter les autres, tant est grande la bonté avec laquelle il vous traite et la puissance qu’il vous donne sur tout ce qui est à lui. Puis donc que c’est là qu’est notre maison et notre patrie, mettons-y en dépôt tout ce que nous possédons, et ne laissons rien ici-bas, de peur de le perdre.
Quand vous tiendriez ici vos trésors enfermés sous cent clés et sous cent verrous, et gardés par des milliers de serviteurs ; quand vous auriez évité tous les piégea de vos ennemis et tous les artifices de vos envieux, quand la rouille épargnerait votre argent, quand la longueur du temps ne porterait aucune atteinte à