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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/139

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assez de force ; Jésus-Christ est venu introduire un moyen efficace de justification par la foi, et accomplir ainsi ce que la loi voulait faire ce que la loi n’avait pu faire par la lettre, lui l’a fait par la foi. C’est en ce sens qu’il dit : « Je ne suis pas venu détruire la loi. »
3. On peut trouver encore une troisième manière selon laquelle Jésus-Christ a accompli la loi, c’est en y ajoutant les préceptes de la loi nouvelle. Car tout ce que Jésus-Christ dit dans l’Évangile n’est point la destruction, mais plutôt la confirmation et l’accomplissement de la loi ancienne. Par exemple, ce commandement : « Vous ne tuerez point », non seulement n’est pas détruit, mais il est même perfectionné et fortifié par celui qu’il fait, de ne se point mettre en colère. On peut dire la même chose des autres préceptes.
Nous avons remarqué tout à l’heure comment Jésus-Christ, en jetant les semences de sa doctrine, a pris soin d’écarter tout fâcheux soupçon, mais comme le parallèle de l’ancienne législation avec la nouvelle était surtout de nature à en faire naître, il les prévient encore par une adroite précaution. En effet, ce qu’il va dire expressément dans ce parallèle était déjà implicitement contenu et établi dans ce qui précède. Car dire : « Bienheureux les pauvres d’esprit », c’est la même chose que dire : « Ne vous mettez point en colère. » En disant : « Bienheureux ceux qui ont le cœur pur », il avait défendu par avance de regarder une femme avec un mauvais désir. En disant : « Bienheureux ceux qui sont miséricordieux », il avait ordonné aux hommes « de ne point amasser de trésors sur la terre. » En disant : « Bienheureux sont ceux qui pleurent et qui souffrent les persécutions et les injures », il avait commandé par avance « d’entrer dans la voie étroite. » En disant que « ceux qui ont faim et soif de la justice sont « heureux », il dit la même chose que ce qu’il commande ensuite : « Faites aux hommes tout « ce que vous voulez qu’ils vous fassent. » En nous assurant aussi que les pacifiques sont « heureux », il a presque dit la même chose que ce qu’il enseigne peu après, « qu’on doit laisser son présent à l’autel, pour aller se réconcilier avec son frère », et qu’il faut être « bienveillant pour son adversaire. »
Toute la différence est que dans les béatitudes il propose des récompenses à ceux qui feront le bien, et ici des supplices à ceux qui commettront le mal, Là, il dit : « Que les doux hériteront la terre ; » il dit ici : « Que celui qui appellera son frère fou et insensé, sera coupable de la géhenne du feu. » Il dit là : « Que ceux qui auront le cœur pur verront Dieu », et il ajoute ici : « Que celui qui jette un regard impudique sur une femme, est un véritable adultère. » Il dit là : « Que les pacifiques seront appelés les enfants de Dieu ; » et il nous épouvante ici par la menace « d’être livrés au Juge par notre adversaire. » il dit là ; « Bienheureux sont ceux qui pleurent et qui souffrent persécution ! » et il menace ici « de la perdition ceux qui marchent dans la voie large. » Ce qu’il dit ici : « Vous ne pouvez servir tout ensemble Dieu et l’argent », me semble aussi conforme à ce qu’il avait déjà dit : « Bienheureux sont ceux qui font miséricorde et qui ont faim et soif de la justice ! »
Mais comme il va donner, je l’ai déjà dit, des préceptes plus clairs, et non seulement plus clairs, mais même plus parfaits (il ne demande plus en effet une simple compassion, mais il nous commande de nous laisser prendre jusqu’à notre manteau ; il ne se contente plus d’une douceur ordinaire, mais il veut, quand on nous donne un soufflet, que nous tendions l’autre joue), il veut d’abord faire évanouir entièrement l’apparente contradiction de la loi avec sa doctrine. C’est pourquoi après avoir dit : « Ne pensez pas que je sois venu détruire la loi », et donné plus de force à son affirmation en ajoutant : « je ne suis pas venu la détruire, mais l’accomplir », non content de cela, il insiste encore en ces termes : « Car je vous le dis en vérité, avant que le ciel et la terre passent, un seul iota, un seul trait ne passera point de la loi sans que tout s’accomplisse (18). » C’est la même chose que s’il eût dit : il est impossible que la loi ne soit accomplie. Il faut nécessairement qu’elle soit observée jusqu’au moindre iota. C’est ce que Jésus-Christ a fait, lui qui l’a parfaitement accomplie. Ce n’est pas sans raison qu’il fait allusion à la transformation du monde. C’est pour élever l’esprit des auditeurs et leur faire entendre que c’était avec justice qu’il voulait les faire entrer dans une voie plus parfaite, puisque toute la création était destinée à subir une transformation, et le genre humain appelé à une autre patrie et à une vie plus sublime. « Celui donc qui violera l’un des plus petits