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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/141

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et presque dans toute l’Écriture, ce mot s’entend de toutes sortes de vertus. Mais remarquez combien est grande la grâce et la loi de Jésus-Christ, puisqu’il commande à ses disciples, qui ne faisaient encore que commencer, d’être plus justes que les docteurs même de la loi. Il n’entend point par ces docteurs de la loi et ces pharisiens, seulement ceux d’entre eux qui étaient injustes, mais ceux même qui gardaient la loi. Car, à moins de cela, il ne les aurait pas appelés justes, en un certain sens, et il n’aurait pas comparé la justice évangélique, qui est la véritable, à la leur, si elle n’avait été au moins extérieure et apparente.
Considérez encore comment Jésus-Christ autorise la loi ancienne, comme il fait voir, en les comparant, que ces deux lois sont comme deux sœurs qui n’ont qu’un même père ; puisqu’en effet elles ne diffèrent que du plus au moins, il s’ensuit qu’elles sont du même genre. Ainsi il ne détruit point la vieille loi, au contraire, il la développe. Mais si elle eût été donnée par le mauvais esprit, comme ont dit les hérétiques, le Sauveur ne se serait jamais mis en peine de l’accomplir, et de la rendre encore plus parfaite, mais il l’aurait rejetée absolument.
Vous demandez peut-être pourquoi cette loi de Moïse, qui était bonne en elle-même, ne sauve plus maintenant les hommes ? Je vous réponds qu’elle ne les sauve plus maintenant depuis l’avènement de Jésus-Christ, parce qu’ayant reçu une plus grande grâce, ils doivent aussi entreprendre de plus grands combats. Mais tous les élus de Dieu, qui ont vécu pendant ces temps-là, se sont sauvés en la pratiquant. Car Jésus-Christ dit dans l’Évangile : « Plusieurs viendront d’Orient et d’Occident, et auront leur place dans le royaume des cieux, avec Abraham, Isaac et Jacob » (Mt. 8,11) Nous voyons aussi que le Lazare, lorsqu’il jouit de ces délices ineffables, demeure dans le sein d’Abraham, et en un mot, ceux qui, dans les premiers siècles, ont éclaté par leurs excellentes vertus, se sont sanctifiés dans la pratique de cette loi.
5. Que si cette loi eût été mauvaise, ou qu’elle eût eu un autre principe que Dieu, Jésus-Christ ne l’aurait pas voulu accomplir. Car s’il ne s’y fût assujetti que pour attirer les Juifs, et non pour montrer l’union de l’une et de l’autre loi, et la conformité que la nouvelle avait avec l’ancienne, pourquoi ne s’assujettissait-il pas de même aux superstitions des gentils, pour les inviter de la même manière ? Cela nous fait voir que si la loi ancienne cesse de sauver les hommes, ce n’est pas qu’elle soit mauvaise, mais c’est que maintenant le temps est venu d’une vertu plus parfaite. Que si elle est moins parfaite que la loi nouvelle, il ne s’ensuit pas pour cela qu’elle soit mauvaise, puisque cette condamnation de la première retomberait même sur la seconde. Car si l’on compare la science de cette vie avec celle du ciel, elle n’est presque rien, et elle sera détruite, quand cette seconde nous sera donnée, « Lorsque nous serons dans l’état parfait », dit saint Paul, « ce qui est imparfait sera aboli. »(I Cor. 13,10) C’est ce qui est arrivé à la loi ancienne, à l’égard de la nouvelle. Cependant nous ne blâmons point la loi de grâce, quoiqu’elle doive cesser lorsque nous serons dans le ciel, « car alors ce qui est imparfait sera « aboli ; » et nous ne laissons pas de reconnaître qu’elle est grande et très-relevée. Puis donc que les récompenses promises y sont plus grandes que dans l’ancienne, et que la grâce du Saint-Esprit y est plus abondante, c’est avec juste raison qu’on nous demande plus de vertu.
Car on ne nous promet plus une terre coulante de lait et de miel, ni une longue vieillesse, ni un grand nombre d’enfants, ni beaucoup de blé ou de vin, ou de grands troupeaux de brebis et de bœufs ; mais le ciel même, et les biens dont on y jouit ; l’honneur d’être les enfants adoptifs de Dieu, les frères du Fils unique du Père, les héritiers de sa gloire, de son royaume ; et d’une infinité d’autres biens. Saint Paul nous fait assez voir combien nous avons reçu plus de grâce que les Juifs, lorsqu’il dit : « Il n’y a donc point de condamnation pour ceux qui sont incorporés en Jésus-Christ, qui vivent et qui marchent non selon la chair, mais selon l’esprit ; parce que la loi de l’esprit de vie qui est en Jésus-Christ, m’a délivré de la loi du péché et de la mort. » (Rom. 8,1)
Après donc que Jésus-Christ a étonné les violateurs de la loi, et établi de si grandes récompenses pour ceux qui y obéiraient, et qu’il a montré ainsi que c’est avec justice qu’il exige plus de nous que des anciens, il commence enfin à rapporter cette loi nouvelle en la coca parant avec l’ancienne. Il le fait pour montrer