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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/17

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C’est sous l’inspiration de ce même Esprit, dont il était rempli, que saint Matthieu a écrit tout son évangile. C’est ce Matthieu qui avait été publicain. Car je ne rougis point d’avouer ce qu’il était, ni ce qu’ont été les autres apôtres, avant que Jésus-Christ les eût appelés. C’est cela même qui relève d’autant plus la grâce du Saint-Esprit en eux, et l’excellence de leur vertu.
Il a appelé son livre « l’Évangile », c’est-à-dire, « la bonne nouvelle. » Car il annonce à tous, aux méchants, aux impies, aux ennemis de Dieu, et à des aveugles assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort, la délivrance des peines, le pardon des péchés, la justice, la sanctification, la rédemption, l’adoption des enfants de Dieu, l’héritage de son royaume, et la gloire de devenir les frères de son Fils unique.
Y a-t-il rien de si grand que « ces nouvelles » qu’il nous apporte ? Un Dieu sur la terre, et l’homme dans le ciel ; un concert admirable rétabli dans toute la hiérarchie des, êtres ; les anges qui chantent avec les hommes, les hommes qui entrent en société avec les anges, avec les vertus et les plus sublimes de ces esprits célestes. Quel spectacle plus grand et plus divin, que de voir une guerre aussi ancienne que le monde cesser tout d’un coup ; Dieu réconcilié avec les hommes ; le diable confondu ; les démons en fuite ; la mort vaincue ; le paradis ouvert ; la malédiction détruite ; le péché banni ; l’erreur étouffée ; la vérité rétablie ; la parole divine semée et fructifiant de toutes parts ; la vie du ciel introduite sur la ferre ; les anges descendre souvent ici-bas ; les puissances et les vertus se familiariser avec les hommes, et la possession de ces biens présents affermie en nous par l’espérance des biens futurs ?
C’est donc avec grande raison qu’on donne le nom « d’Évangile » à cette histoire sacrée. Tous les autres écrits qui ne promettent que l’abondance des richesses, la grandeur de la puissance, la principauté, la gloire, les honneurs, et tout ce que les hommes croient être des biens, ne sont que vanité et que mensonge. Mais ce que les pêcheurs nous annoncent est avec raison appelé « l’Évangile » c’est-à-dire, « la bonne nouvelle ; non seulement parce qu’ils nous promettent des biens stables, immuables et, qui sont beaucoup au-dessus de nous, mais encore parce que nous en jouissons sans aucune peine. Car ce n’est ni par nos travaux, ni par nos peines, ni par nos douleurs et nos afflictions que nous nous sommes procuré ces biens. La seule charité que Dieu a pour nous a tout fait, et ce n’est que d’elle que nous avons reçu ces grâces.
Mais pourquoi, sur les douze apôtres qu’avait Jésus-Christ, n’y en a-t-il que deux, Jean et Matthieu qui aient écrit l’Évangile, avec deux disciples, Marc, disciple de saint Pierre, et Luc, disciple de saint Paul ? C’est parce que ces hommes, oubliant la vaine gloire, ne consultaient pour agir que la simple utilité.
Mais à ce compte, me direz-vous, un seul Évangéliste ne suffisait-il pas pour tout dire ? C’est vrai, mais lorsqu’on voit quatre personnes écrire chacune son évangile en divers temps, en divers lieux, sans s’assembler ou conférer ensemble, et parler tous néanmoins, comme s’ils n’avaient qu’une même bouche ; cette union de sentiments et de paroles est une puissante preuve de la vérité.
Il semble, dites-vous, qu’on en pourrait croire le contraire, puisqu’ils se trouvent différents en plusieurs choses. Je vous réponds que ces différences sont précisément la plus forte preuve de la véracité des Évangélistes. Car s’ils étaient si conformes entre eux, et s’ils s’accordaient jusqu’aux moindres circonstances dès lieux et des temps, et jusque dans les expressions qu’ils emploient, vous entendriez les ennemis de l’Église dire qu’ils ont écrit de concert, et qu’une conformité si exacte ne peut être que le fruit d’une entente préalable et d’un arrangement tout humain. Mais maintenant ces petites différences qui se trouvent entre les Évangélistes les purgent visiblement de ce soupçon, et justifient la sincérité de leur conduite. S’ils ont quelquefois parlé différemment des lieux ou des temps, cette diversité ne nuit en aucune sorte aux vérités qu’ils annoncent, comme nous espérons avec le secours de Dieu de le faire voir dans la suite.
Mais nous vous prions cependant de remarquer, que pour ce qui regarde les vérités capitales qui renferment la vie de l’âme et l’essence de la prédication évangélique, on ne trouvera jamais qu’il y ait la moindre opposition entre eux. Ils disent tous qu’un Dieu s’est fait homme, qu’il a fait de grands miracles ; qu’il a été crucifié et enseveli ; qu’il est ressuscité et monté au ciel ; qu’il viendra un jour juger le monde ; qu’il a établi une loi très